Ah la flemme… Si vous êtes comme moi, vous connaissez bien cette sensation entre la végétation et la fatigue. Elle nous met KO, nous immobilise sur notre canapé, et nous empêche d’être productifs… Quand nous avons abattu quantité de boulot en amont, la flemme est agréable et méritée, mais quand elle surgit au moment de nous mettre sérieusement au travail… C’est la cata.

Je suis une grande victime de ce fléau, qui m’empêche tantôt de plancher sur un travail important, de passer un coup de fil désagréable, ou pire, de sortir mon instrument de sa housse, pour bosser le jazz.

Et si Miles Davis avait eu la flemme de bosser sa trompette ? Si Bill Evans avait procrastiné sa recherche de voicings ? Si Coltrane avait préféré regarder la télé plutôt que de répéter inlassablement ses gammes ?

Tant de génies n’auraient pu s’exprimer s’ils avaient eu la flemme..!

Blague à part, ce serait quand même beau, un monde où nous serions toujours motivés et en forme pour travailler, et donc en progrès constant. Un monde dans lequel nous n’aurions plus l’impression de stagner par flemme de travailler.

Alors j’ai fait mes recherches, et, même si le sujet peut paraître anecdotique, sans importance, il s’avère que je ne suis pas le seul à m’y intéresser. Des scientifiques se sont penchés sur la question, ce qui m’a permis d’identifier trois clés pour remporter le combat contre la flemme.

Attention, dans cet article, vous ne trouverez pas de conseils du style « Couchez-vous et levez-vous tôt » ou « Faites une to-do list ». Je pense que vous avez déjà entendu ce genre d’astuces un bon millier de fois, et même si elles se révèlent souvent utiles, essayons d’aller un peu plus en profondeur dans le sujet.

C’est parti, commençons par nous intéresser aux causes psychologiques à l’origine de la flemme.

Comprendre la Flemme

Difficile de trouver des ressources sérieuses qui traitent du sujet ! J’en ai quand même trouvé deux qui vont se révéler utiles.

D’après cet article issu d’un site spécialisé dans la psychologie, la flemme est en fait un mécanisme psychologique qui résulte en un blocage mental conduisant à l’impossibilité de passer à l’action.

Ce blocage peut avoir trois causes :

  • Le fait que la tâche à réaliser n’engendre aucun plaisir ;
  • Qu’une angoisse profonde et inconsciente vienne parasiter notre motivation ;
  • Ou que l’accomplissement de la tâche en question bouscule notre conception du monde (ce que nous avons intégré comme étant correct et possible). 

J’ai par ailleurs beaucoup entendu parler du livre The War of Art de l’écrivain américain Steven Pressfield (il occupe la première place des bouquins que je dois lire de toute urgence !).
D’après ce que j’en ai compris, l’objet du livre est le combat contre ce que Pressfield appelle la « Résistance ».
Ce rassemblement de blocages psychologiques causerait une sévère procrastination au moment d’accomplir une tâche impliquant un processus créatif, plus particulièrement dans le cas de l’auteur : l’écriture d’un livre.

Spoiler alert : La Résistance telle que la décrit Pressfield ne disparaîtrait en réalité pas vraiment, mais il existerait cependant des moyens de la combattre et de l’atténuer, ce qui me donne de bons espoirs quant à l’issue de mon combat contre ma flemme personnelle.

1er conseil : Renouer avec le plaisir

Par le passé, ma routine de travail ressemblait à ceci : 30 min de tel exercice, 15 de montées et descentes de gammes selon tel ou tel pattern, de l’ear-training bête et méchant, du déchiffrage !

Tout cela n’est pas franchement fun, et ces exercices, certes utiles, n’étaient pas directement reliés à la raison première de mon engagement envers le jazz. À la cause profonde qui m’a poussée à aller à fond dans cette voie.

Et vous, quelle est cette chose qui vous a émue au départ, qui vous a poussé à acheter un instrument, investir du temps et de l’argent dans cette pratique ? Quel est cet élément qui vous procure du plaisir ?

Une des raisons qui me pousse à vouloir faire du jazz se manifeste souvent quand je tombe sur des vidéos de guitaristes en solo. Je suis instantanément plongé dans un état de fascination face à l’inventivité et l’élégance avec laquelle ils résolvent le problème inhérent à l’exercice : Réussir à jouer un morceau dans son entièreté (ligne de basse, accords, mélodie, structure en même temps…) avec seulement six cordes, deux mains, et un seul cerveau !

Je ne sais pas pourquoi, mais cela fait naître en moi une motivation infinie qui pourrait me faire lever des montagnes. Je ressens une envie irrésistible de me mettre à travailler. 

J’ai mis cette envie à la source de ma pratique, résultat : j’ai beaucoup moins de mal à m’y mettre !

Cela peut paraître évident pour certains d’entre vous qui lisez ces lignes, sinon, réfléchissez-y…
Est-ce que tout ce que vous travaillez est connecté à la cause de votre engagement envers le jazz ?
Si non, avez vous la flemme ou procrastinez vous votre pratique de tous les jours ?

2nd conseil : Affronter ses peurs 

Il est possible qu’un événement marquant de notre passé, remontant parfois jusqu’à notre enfance, oublié depuis longtemps, soit la cause du blocage mental qui mène à la flemme.

Pas le choix ! Il faut se faire sa propre psychanalyse, ou, si la flemme devient maladive, aller voir un psy.

Malheureusement, les limites de mes connaissances dans ce domaine m’empêchent de m’y étendre. Mais d’expérience, je peux toutefois vous conseiller, même sommairement. 

Voici quelques questions à se poser pour trouver la source du problème :

  • Pourquoi n’ai-je pas envie de me mettre à travailler le jazz ? 
  • Qu’est-ce qui m’en empêche physiquement ?
  • Rien ? Et mentalement ? Ai-je peur de quelque chose ?

La peur de l’échec, de ne pas être à la hauteur, de paraître ridicule, ou bien de souffrir sont autant de sources potentielles d’un blocage…

J’ai un exemple personnel mettant en scène la peur de l’échec :

Récemment, je bossais les tempos up, en m’enregistrant sans métronome.
Je voulais que mon time, mes lignes mélodiques et mon phrasé soient rigoureusement parfaits, mais à la réécoute, j’étais bien loin du compte…
Frustré devant mon inaptitude à atteindre mes objectifs, j’abandonnais et le lendemain, j’étais toujours hanté par l’échec de la veille, qui ne m’aidait pas à m’y remettre… ! 

Seule solution, descendre d’une marche de mon « escalier de progression ». Dans ce cas précis, j’ai enlevé 30 points de tempo, et même si c’était encore difficile, ce n’était plus inatteignable.
La réussite n’en a été que plus délectable, et a alimenté ma motivation pour le travail à venir. (Et j’ai fini par réussir mon exercice avec mes 30 bpm en plus !)

Ces peurs parasites (si elles ne sont pas maladives) peuvent être affrontées, il faut parfois faire preuve de lucidité, et de recul. Quitte à en passer par une autoévaluation honnête et une bonne dose d’humilité !

3e conseil : Bousculez votre conception du monde

La 3e cause potentielle de la flemme identifiée par Psychologies est particulièrement intéressante, et je me permets de citer un bout de leur article : 

Un conflit psychique, voilà une autre excellente raison de demeurer dans l’inertie.
« C’est la bataille que se livrent nos désirs et nos interdits, analyse Saverio Tomasella. Quand le désir – ce qui fait se mouvoir l’individu – entre en conflit avec ce qui a été intégré comme incorrect ou impossible, alors l’immobilisme est la seule solution. S’ensuit une forme d’indécision, de paralysie, l’expression de ce que l’on appelle la pulsion de mort. »
Si notre désir n’a pas été reconnu, accepté, valorisé, la pulsion de vie s’éteint. Nous sommes coupés dans notre élan. Et n’arrivons plus à avancer.

Posez-vous la question. Est-ce que, dans votre environnement, votre vœu de pratiquer le jazz a été « reconnu, accepté » et est « valorisé », encouragé ?

Est-ce la norme autour de vous ?

Pour ma part, la réponse et oui, et je mesure la chance que j’ai ! Je côtoie chaque jour des musiciens professionnels, ou des élèves de mon école qui aspirent à le devenir, mes parents sont musiciens, mon temps est consacré à 90% à la musique…

Travailler le jazz s’impose comme une évidence, pour rester au niveau, ou même se conformer à la pression sociale…

Mais tout le monde n’a pas cette chance, peut-être que votre temps est consacré à la famille que vous avez construite, peut-être que vous vous lancez tardivement, que personne ne fait cela autour de vous. La pratique du jazz est peut-être en total contraste avec votre environnement qui ne vous renvoie qu’une profonde incompréhension.

« À quoi bon travailler aujourd’hui ? », « N’ai-je pas mieux à faire ? »… Tant de questions qui fusent, et qui s’avèrent difficiles à gérer…

Si vous êtes dans ce cas, mais que le besoin de jouer du jazz reste irrépressible malgré tout, j’ai un conseil à vous donner. Même avec un contexte défavorable, il est possible de créer une fenêtre vers un autre environnement, où repiquer des chorus est un passe-temps prisé, travailler ses gammes, une préoccupation collective… Un monde où le jazz est roi.

Se créer un environnement virtuel fertile

Il suffit de faire appel aux outils numériques. À Internet et ses nombreux réseaux sociaux.

Grâce à Youtube, il est possible de prendre des cours avec les plus grands jazzmen de la planète ! Rien qu’en tapant « Masterclass Jazz » dans la barre de recherche, je peux suivre les enseignements de Pat Martino, Jim Hall, Benny Golson, Dee Dee Bridgewater, Cyrus Chestnuts, Chris Potter…

Grâce à Facebook et Instagram, je peux être en contact presque direct avec nombre de mes idoles, et rester au fait de leurs actualités.

Des forums fourmillent sur la toile, parfois dédiés à notre instrument, où l’on peut trouver les réponses à nos moindres questions et converser en compagnie d’initiés d’un sujet qui nous tient à coeur.

Des sites à l’image de Jazzcomposer.fr vous prodiguent conseils, enseignements, suggestions, cours en ligne…

J’ai même trouvé une chaîne de lives Twitch avec des séances de travail technique pour la trompette !! Parfait pour se motiver à travailler un aspect de l’instrument pas franchement sexy au départ…

Il est possible d’arrêter d’avoir la flemme, de se motiver et de créer des choses en s’aidant de cet environnement virtuel.
C’est personnellement ce que j’ai fait en m’immergeant sous des tonnes de vidéos, podcasts, articles de blogs et newsletters sur le blogging et l’entreprenariat. Jamais mon environnement physique ne m’aurait d’une quelconque manière amené à créer Jazzcomposer.fr.

Conclusion

J’espère que cet article vous sera utile, vous amènera des pistes de réflexion sur votre pratique et vous aidera à combattre la flemme de travailler le jazz.

  • Visez le plaisir dans votre pratique et reconnectez vous à ce qui vous a motivé à jouer du jazz.
  • Analysez vos peurs et appréhensions, cherchez ce qui les entretient dans votre pratique et agissez en conséquence.
  • Entourez vous d’un environnement propice, physique ou virtuel, et immergez vous la tête la première dans le jazz.

Grâce à ces conseils, la flemme n’a qu’à bien se tenir !

Et si, après avoir tout appliqué à la lettre, il vous arrive encore de procrastiner, essayez de vous coucher et de vous lever tôt, de faire du sport et d’avoir une alimentation saine, sait-on jamais…

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