7 Plans Blues à voler aux grands jazzmen pour mieux jouer le Blues

Si vous lisez assidûment les articles de ce site, vous devez mieux connaître la Théorie qui se cache derrière les gammes et les accords utilisés en Jazz.
Mais si vous voulez vraiment « sonner jazz », il va falloir mettre la main à la pâte et étudier le Langage des grands jazzmen. Pour ce faire, il faut relever des solos, apprendre des plans, les transposer dans les 12 tonalités…

Pour démarrer la machine, nous allons nous intéresser à une grille basique, sans doute la plus jouée en jazz : la grille de Blues. Je vais vous donner 7 plans issus de solos de grands jazzmen qui vont enrichir votre jeu du langage à utiliser sur cette grille précise.

Petit Rappel : Les 6 points cruciaux de la grille de Blues

Dans cet article, je vais partir du principe que vous êtes à l’aise avec les concepts de :

  • Grille de Blues « Jazz » (La grille de blues avec les changements d’accords Be-Bop, voir cet article) ;
  • Gammes Blues Majeure et mineure (Les gammes pentatoniques Majeures et mineures enrichies de Blue Note, j’en parle en détail dans mon cours complet sur l’Harmonie Jazz) ;
  • Gamme Be-Bop (voir cet article) ;

Également, je vais faire référence à de multiples reprises aux 6 points cruciaux de la grille de Blues. Il est impératif que vous compreniez l’harmonie de la grille de Blues Jazz et ses différentes cadences pour saisir les enjeux qui se cachent derrière le vocabulaire harmonie des différents plans.

Par chance, j’ai dédié un article complet sur le sujet. Si vous ne l’avez pas encore lu, ouvrez le lien dans un nouvel onglet et revenez à cet article ensuite.

Remarque : Vous pouvez tout de même suivre cet article sans avoir tous ces pré-requis en tête, et travailler les 7 plans que je vais vous présenter sans vous soucier de mon analyse !

Je vous indique ci-dessous les conclusions de l’analyse, où nous avons divisé les 12 mesures de la grille de Blues en 6 blocs :

  1. Mesures 1-3 : I7 IV7 -> I7. Une cadence plagale vers le Ier degré de couleur 7, « bluesifié » ;
  2. Mesures 4-5 : ii/IV V/IV -> IV7. Sous-dominante et dominante secondaires du degré IV avec résolution sur le IV7;
  3. Mesures 5-6 : IV, #IV°. Stationnement sur le IVe degré et retour sur le I7 avec un #IV° ;
  4. Mesures 7-8 : I ii ii7b5/ii V7b9/ii -> ii. Mouvement diatonique et atterrissage sur le iind degré grâce aux sous-dominantes et dominantes secondaires ;
  5. Mesures 9-11 : ii V -> I. C’est le moment où vous pouvez caser vos plus beaux plans sur le ii V I !
  6. Mesures 11-12 : I V/ii ii V. Un Anatole enrichi de la dominante secondaire du iind degré.

Voyons maintenant comment les grands jazzmen s’en sortent pour faire sonner ces 6 passage clés.

Plans blues N°1 et N°2 : Harry Sweets Edison sur Sweetcakes

Nous commençons par étudier le jeu d’un de mes trompettistes favoris : Harry « Sweets » Edison (il fait sonner la grille de blues comme personne !).
Voici le plan que j’ai sélectionné, il se trouve au début d’une grille de blues en Ab majeur :

Arrivez-vous à deviner quelle(s) gamme(s) « Sweets » utilise ici ?

En fait, la seule gamme utilisée pour ces trois phrases est la gamme blues majeure de La bémol. La voici :

« Sweets » éclipse ici la 3ce majeure et la 2nde majeure et accentue la Blue note pour relier le début de sa phrase à la Tonique. Observez comment il varie son motif la 3e fois en remplaçant la Sixte par la Tonique et la 5te par la 6te :

C’est un beau plan à se mettre sous les doigts, qui pourra se jouer à tous les tempos.

« Sweets » utilise le même genre de phrase un peu plus tard dans le même morceau, cette fois-ci dans un mouvement ascendant :

Plan N°2

Nous retrouvons la gamme blues au début de la phrase, cette fois-ci avec la 3ce majeure incluse. Mais ce n’est pas le seul matériau harmonique utilisé.

Observez le chromatisme du 3e temps de la 3e mesure (4e mesure si on compte la levée).
Tonique, puis 7e Majeure, puis 7e mineure, cela ne vous dit rien de spécial ?

Oui, c’est bien la gamme Be-Bop dominante de Ab, gamme qui vous est familière si vous avez lu cet article. La voici :

Pour analyser le reste de la phrase, je ne vais pas tenir compte de l’accord de Eb-7, je ne pense pas que « Sweets » l’inclue dans sa phrase.

Pourquoi ?

Ma théorie est ici que le changement de matériau harmonique correspond au changement de point crucial de la grille. En effet, la phrase de « Sweets » fait la jonction entre les points 1 et 2, la cadence plagale du début et le ii V vers le IV.

Pour souligner le ii V, il change de vocabulaire, au lieu de rester « bluesy » comme sur le 1er point, il utilise ici du langage be-bop pour mieux faire entendre les mouvements de tension et résolution du ii V I.

Observez le 4e temps de la mesure 4 (sans compter la levée), la note Sol bémol y est jouée. Elle correspond à la 4te Juste par rapport à Db majeur, notre point d’arrivée. Cette note est caractéristique de la fonction sous-dominante de la tonalité de Db majeur.
Or, en passant sur l’accord de Db7, il utilise cette note en la faisant résoudre vers la note Fa, qui caractérise la fonction tonique de la tonalité de Ré bémol. Ces deux notes induisent le mouvement de cadence parfaite entre Ab7 et Dbmaj7 comme indiqué sur le schéma ci-contre.


Sauf que « Sweets » annonce le Sol bémol dès la fin de la troisième mesure, il prépare donc son arrivée sur le Db7 dès cet instant. En outre, cela correspond clairement à l’endroit où il emploie la gamme Be-Bop de La bémol.

Je pense donc qu’il éclipse le Eb7 et pivote du Ab7 Ier degré de blues au Ab7 Ve degré de Db majeur, en l’anticipant. Comme ceci :

« Sweets » change donc de vocabulaire pour passer du premier au second point crucial de la grille. Ce procédé est très courant, et nous en aurons un autre exemple avec le plan N°5.

Plan blues N°3 Charlie Parker sur Now’s the Time

Avançons et intéressons nous au 3e point crucial, le IVe degré. J’ai sélectionné pour ce faire un plan très court utilisé à de nombreuses reprises par Charlie Parker dans ses solos sur le Blues.
Nous allons voir que sa simplicité apparente renferme quelques surprises. Le voici, dans le cadre d’un Blues en Fa :

Devinez quel est le matériau utilisé par Parker. Bb Blues, Bb mixolydien ? En fait, pas vraiment. À mon avis, son plan est découpé de trois manières :

  1. Fa blues mineur : Au début, les notes Fa Lab Fa sont Tonique et tierce mineure potentielles de la gamme de Fa blues mineure, Fa étant la tonalité de notre blues. Gardez cela dans un coin de votre tête, le plan suivant utilise la même technique, en développant la phrase.
  2. Bb Blues majeur : Si vous suivez bien, vous l’avez reconnu. C’est le même plan que le premier de « Sweets » Edison !
  3. Fa blues majeur : Fa Sol La bémol : Tonique 2nde 2nde aug. Cela pourrait aussi être Bb mixolydien.

Ce qu’on peut retenir de ce plan, c’est qu’il est simple, et efficace. Les trois premières notes, accentuées comme il le fait sonnent vraiment blues, à utiliser sans modération.
J’aime aussi la possibilité de jouer Bb blues majeur à cet endroit. Cela donne des idées : on pourrait imaginer jouer une phrase blues sur les Ier degré des mesures 1 et 3, et jouer cette même phrase sur cette mesure, transposée d’une 4te ascendante…

Plan Blues N°4 Wynton Kelly sur Freddie Freeloader

Regardons de plus près le procédé évoqué dans la partie précédente, à savoir jouer la gamme blues mineure du premier degré sur le IVe degré. Nous allons jeter un oeil sur cette superbe phrase de Wynton Kelly sur Freddie Freeloader, un blues en Si bémol :

Jetez un oeil à la gamme blues mineur de Si bémol. Que remarquez-vous ?

En effet, malgré que l’accord soit un Eb7, Wynton Kelly joue tout le début de sa phrase sur la gamme blues mineure de Si bémol, la tonalité de notre blues.
Pourquoi est-ce que cela fonctionne ? Regardez donc une analyse de la gamme blues par rapport aux accords Eb7 et E° (le #iv° dans un blues en Bb majeur) :

Beaucoup de notes sont donc communes à la gamme et aux deux accords.

En fait, penser sa phrase à partir de la tonalité de notre morceau ou de la cadence dans laquelle on se trouve correspond à une pensée horizontale de l’harmonie.
Cela s’oppose à la pensée verticale, qui consiste à jouer chaque accord en montant ou descendant sa gamme ou son arpège.
Je ne m’étends pas sur le sujet, j’y ai dédié une séquence entière dans mon cours Harmonie Jazz : de la Théorie à l’Improvisation.

Terminons notre plan. Wynton Kelly revient sur le Ier degré, Bb7 en faisant s’alterner Bb blues mineur et Bb blues majeur :

Remarque : Freddie Freeloader est un morceau avec une grille simple qui ne contient pas les mouvements IV #iv° I et I ii ii/ii V/ii. Avec cette harmonie derrière, le plan fonctionne un peu moins bien, mais la puissance du son blues est telle que cela va quand même marcher, cf. la dernière partie)

Une astuce pour les instruments polyphoniques :

Dans le plan ci-dessus, Wynton Kelly harmonise sa phrase basée sur la gamme blues mineure avec la tonique en note supérieure :

Le son de cette harmonisation est très Bluesy car la tonique et la Blue note de la gamme blues mineure sont situées à un triton d’écart, un intervalle hautement dissonant qui définit le son du blues.

Il se sert aussi de cette note pour enrichir le reste de sa phrase qui utilise la gamme blues majeure. Même si cela fonctionne, il pourrait utiliser une autre note pour ce faire, et c’est ce qu’Oscar Peterson va nous montrer.

Plan Blues N°5 Oscar Peterson sur Now’s the Time

Regardez le début de cette phrase d’Oscar Peterson (début d’un blues en Fa) :

Nous retrouvons une harmonisation similaire à celle proposée précédemment par Wynton Kelly. Sauf qu’ici, deux choses changent :

  • La gamme employée est la gamme blues majeure (de Fa ici) ;
  • La note qui harmonise en note supérieure est la Sixte Majeure de cette gamme.

En effet, dans la gamme blues majeure, la note située à un triton de la Blue note est bien… la Sixte :

Donc, si vous improvisez sur la gamme blues mineure, vous pouvez harmoniser avec la Tonique en top note.
Par contre, si vous improvisez avec la gamme blues majeure, privilégiez la Sixte.

D’ailleurs, reprenons la fin du plan de Wynton Kelly avec cette idée en tête :

(Ici joué en Sol au lieu de la tonalité originelle Si bémol)

Ça sonne super aussi, non ?

Jetons un oeil à la fin de la phrase de Peterson. Nous pouvons la découper en 4 segments, que voici :

  1. (Le début basé sur la Gamme Blues majeure de Fa) ;
  2. Une phrase basée sur la gamme blues mineure avec la 3ce majeure incorporée qui fait référence à la gamme blues majeure ;
  3. Un cliché be-bop qui fait penser au début du thème Donna Lee ;
  4. La continuité de la phrase be-bop, utilisant gamme be-bop de Fa sur les premier et deuxième temps, puis le même tracé mélodique chromatique mais à partir de la sixte de la gamme pour atterrir sur la fondamentale de l’accord suivant ;
  5. Fin de la phrase Be-bop avec le vocabulaire de Bb mixolydien et une appogiature Be-bop.

Là encore, le vocabulaire be-bop est utilisé pour passer d’un virage important de la grille à un autre, tel le second plan de « Sweets » Edison vu plus haut.

Plan Blues N°6 Wes Montgomery sur D Natural Blues

Nous sommes maintenant dans le cadre d’un blues en Ré. Observez comment Wes aborde la progression ii/ii V/ii -> ii, notre 4e point névralgique aux mesures 8 et 9 de notre grille de Blues :

J’ai une question pour vous. À votre avis, comment Wes Montgomery s’y prend-il pour réussir à jouer les notes des accords tout en sonnant « bluesy » ?

Eh oui, il utilise les gammes blues, en prenant soin de choisir ses notes en fonction de l’harmonie qui défile :

Analysons ces quatre segments :

  1. Encore une belle manière de manier la Gamme blues ;
  2. Trois notes notes (sans compter l’appogiature) empruntées à la gamme blues mineure ;
  3. Quatre notes de la gamme blues majeure ;
  4. Un mix entre mineur et majeur. Si vous avez bien suivi, c’est l’exact même petit morceau que ce que joue Wynton Kelly dans Freddie Freeloader (4e temps de la 2nde mesure (sans compter la levée)),

Wes Montgomery joue donc Ré blues sur F#-7b5 B7b9 -> E-7… Cette manière d’approcher ce point crucial de la grille correspond encore une fois à une pensée horizontale.

Observons Joe Pass faire de même avec la fin de la grille :

Plan Blues N°7 : Joe Pass sur Joe’s Blues

Nous sommes maintenant dans le cadre d’un blues en Sol, sur les 4 dernières mesures, ce qui correspond à la cadence ii V I. Voici ce que Joe Pass propose :

Encore… Du blues !

Analysons cette phrase en se référant aux gammes blues mineure et majeure de Sol :

  1. Le début de la phrase est certes un arpège de A-9, mais aussi et surtout les notes la gamme blues majeure de Sol ;
  2. Joe Pass descend la gamme blues mineure de Sol sur le D7. Il prend soin d’harmoniser la 4te (par rapport à la note Sol) avec une note triton descendant. Cela donne les notes Do et Fa#, qui correspondent avec les 3ce et 7e du D7. La #4 (par rapport à Sol) qui précède est aussi harmonisée avec un triton, ce qui par rapport à l’accord est une approche chromatique.
  3. Résolution sur la gamme blues majeure, avec le même type d’harmonisation eu triton qui donne les 3ce et 7e de l’accord.
  4. Petite relance avec les notes de la gamme blues mineure.

Jouer blues sur ce ii V fonctionne, car même si la majorité des notes sont communes aux accords et aux gammes blues, cela revient surtout à anticiper la résolution vers le Ier degré.
C’est encore du jeu horizontal : Joe Pass base sa phrase par rapport à la tonalité de la cadence plutôt que ses accords individuels.

Cela nécessite tout de même de bien retomber sur ses pattes, à travailler, donc !

Résumons ce que nous avons appris, et assemblons ces 7 plans blues

Eh bien, ces 7 plans à jouer sur la grille de Blues nous aurons appris beaucoup de choses :

  • On peut jouer blues majeur sur le début de la grille ;
  • On peut utiliser le vocabulaire be-bop (gamme be-bop) de notre tonalité pour aller sur le degré IV7 ;
  • Jouer la gamme blues mineure de notre tonalité sur le IV7 fonctionne, c’est jouer de manière horizontale (on peut en déduire que faire cela fonctionne aussi à la 2nde mesure) ;
  • Mais on peut aussi jouer la gamme blues majeure du IV7 à cet endroit ;
  • Mixer les gammes blues majeure et mineure de notre tonalité sur les 7e et 8e mesures fonctionne aussi (jeu horizontal là encore) ;
  • Même chose sur le ii V I final ;

Partant de ce constat, on dirait qu’on peut jouer blues sur presque toute notre grille !!
Regardez plutôt :

Et le dernier point crucial alors, les deux dernières mesures ? Peut-on jouer blues aussi à cet endroit ? C’est ce que nous allons voir.
Assemblons nos 7 plans de manière à façonner deux grilles complètes, en utilisant le second (celui de Sweets Edison qui utilise la gamme blues majeure) à l’endroit fatidique :

Verdict : ça fonctionne. Allez, à vous de jouer !

Travaillez ces plans pour incorporer le langage des grands jazzmen dans votre jeu. Vous gagnerez au passage les quelques subtilités harmoniques que j’ai analysées tout au long de cet article.

Tous les plans contenant des triolets (Le 4e de Wynton Kelly, le 6e de Wes Montgomery, le 7e de Joe Pass) seront assez difficiles à jouer au dessus de 120 bpm (le tempo auquel je joue mon exemple ci-dessus). Par chance, un paquet de blues se jouent à ce tempo là ou en-dessous : Sandu, Billie’s Bounce, Blue Monk, Freddie Freeloader

Si vous avez des questions, des remarques, laissez un commentaire, je vous répondrai avec plaisir.

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Image de couverture : Oscar Peterson in 1977, Flickr, Tom Marcello (https://www.flickr.com/people/11447043@N00/) Webster, New York, USA. Licence

Comment la gamme Be-Bop règle le problème n°1 des gammes basiques

Vous rêvez de faire de longues phrases be-bop ? De jouer des tripotées de croches avec des chromatismes complexes et virtuoses ? De rendre Charlie Parker fier de l’héritage qu’il a laissé derrière lui ?

Super programme. Mais il faut que je vous prévienne, cela risque de ne pas se passer comme prévu si vous utilisez les gammes basiques : la gamme majeure, le mode mixolydien, etc…

En effet, ces gammes ont à leur essence même un problème majeur qui peut vous empêcher de sonner aussi bien que les plus grands boppeurs. Dans cet article, je vais vous expliquer pourquoi, et comment la gamme be-bop peut nous sauver la mise.

Croches : La hiérarchie des notes dans notre mesure

Prenons une mesure à 4/4, métrique dans laquelle se joue la quasi-totalité des standards.
Notre mesure comporte 4 noires, divisées en 2 croches, ce qui nous donne au total 8 croches.
Jetez un oeil à ce schéma :

La première croche tombe sur le 1er temps, la seconde, sur le « et » du 1er temps (en contretemps donc), la 3e croche tombe sur le 2nd temps, etc…

En fait, les croches qui vont tomber sur les temps vont sembler à l’oreille plus importantes que les croches placées en contretemps. Cette règle s’applique aussi bien aux croches swing qu’aux croches binaires. Laissez-moi vous donner un exemple.

Imaginons que je veuille improviser sur un premier degré majeur avec la gamme majeure correspondante. Ici, je vais prendre Cmaj7 et la gamme de Do majeur. Je vais la jouer avec un rythme de croches :

Voici maintenant la même phrase, mais décalée d’une croche :

Entendez-vous la différence ? La première phrase est bien placée, la seconde, non. Pourquoi ?

Analysons ce qui se passe. Dans mon premier exemple, les notes qui tombent sur le temps sont : Do, Mi, Sol, Si. C’est l’arpège de Do majeur 7, le degré que je cherche à jouer, parfait, donc.
Dans mon second exemple, les notes qui tombent sur les temps sont : Ré, Fa, La, Do. C’est l’arpège de mon second degré, D-7. Ce n’est pourtant pas l’accord sur lequel j’essaie d’improviser, mon premier degré, Cmaj7. Nous avons donc une sensation auditive désagréable, comme si le contenu de ma phrase était « décalé » par rapport à la normale.

Cette règle est aussi valable pour les phrases en double-croches. Les notes qui tombent sur les croches vont être plus importantes que celles qui sont « en l’air ».

Le Problème avec nos gammes classiques

Cette règle maintenant en tête, intéressons nous à la constitution de nos gammes « basiques » : la gamme majeure, la gamme mineure naturelle, le mode mixolydien…

Sans même les avoir sous les yeux, vous pouvez me lister une caractéristiques qu’elles ont en commun. Ce que je cherche à vous faire deviner, c’est qu’elles ont toutes 7 notes.

Cela peut sembler anecdotique, mais c’est pourtant ce qui pose problème lorsqu’on s’attelle à construire des phrases en croches. En effet, je vous disais tout à l’heure que notre mesure comporte huit croches. Si nous montons notre gamme dans un mouvement régulier et pair (conjointement, ou par tierces, ou par quartes…), au bout de 7 notes, nous allons nous retrouver à l’envers !

Regardez plutôt :

Je suis de nouveau en train d’improviser sur un Cmaj7 avec la gamme de Do majeur. Dans ma première mesure, ce sont les notes Do, Mi, Sol et Si qui tombent sur les temps et qui vont paraître les plus importantes. Mais dès que nous dépassons le quota des 7 notes, les notes qui tombent sur le temps sont Ré, Fa, La, et Do, exactement celles qu’on ne veut pas trouver à cette place !

Jamais nous ne pourrons sonner aussi bien que les boppeurs en utilisant nos pauvres gammes à 7 sons… Il faudrait rajouter une note pour que l’équilibre se fasse de nouveau et que nous puissions jouer plus de deux mesures « bien placé »…

La Gamme Be-Bop et son chromatisme ajouté

Nous sommes sauvés, voici la botte secrète des boppeurs, la Gamme Be-Bop. Pour la construire, il vous suffit de prendre la gamme majeure et d’ajouter un chromatisme, une note en plus non contenue dans notre tonalité, ici la 6te mineure par rapport à notre fondamentale :

Si je vous rejoue ma phrase de tout à l’heure, avec le chromatisme en plus :

Les notes qui tombent sur les temps ont légèrement changé par rapport à mon exemple précédent. Nous avons maintenant Do, Mi, Sol, La pour la première mesure et Do, Mi, Sol, La pour la seconde. C’est pour les deux mesures l’arpège de C6, accord tout à fait interchangeable avec l’accord de Cmaj7 (les jazzmen des années 30 jouaient presque exclusivement leurs premier degrés majeurs avec la couleur majeur 6).

La Gamme Be-Bop que je viens de vous présenter est la gamme Be-Bop « Majeure », à jouer sur les accords majeurs, donc. Il en existe deux autres vraiment essentielles à connaître :

Les deux autres Gammes Be-Bop essentielles : Mineure et Dominante

Voici la gamme Be-Bop à jouer sur les accords mineurs :

C’est en fait la gamme mineure mélodique (aussi appelé mode mineur-majeur, une gamme majeure dont la 3ce a été abaissée), avec le chromatisme de la 6te mineure en plus.

Attention, ne jouez pas cette gamme sur un accord mineur avec une 7e mineure (min7 donc).
En effet, ses altérations font entendre un accord -6, avec dans le mode une 7e majeure.
Cette gamme est donc plus appropriée pour jouer les premier degrés de tonalité mineure, qui ont par défaut une couleur min6 ou min-maj7. Si cela ne vous paraît pas clair, jetez donc un oeil à mes articles sur la tonalité mineure.

Je n’ai malheureusement pas trouvé d’exemples d’utilisation de cette gamme dans les improvisations des boppeurs (si vous en avez sous le coude, indiquez-les donc en commentaire !).
En effet, sur les premier degrés mineurs, ces derniers préfèrent jouer mineur mélodique, sans se soucier du chromatisme intégré.

Cependant, cette gamme est très utile pour accompagner les morceaux mineurs, car son harmonisation à quatre voix permet de créer un système bien rôdé où s’alternent accords mineurs 6 renversés et accords diminués (mais ce sera pour un autre article !).

Voici maintenant notre dernière gamme, la gamme be-bop dominante :

Comme son nom l’indique, elle est à jouer sur les accords 7, accords dits « de dominante », cela se vérifie à son échelle d’intervalle. Elle est en effet similaire à celle du mode mixolydien (le mode du Ve degré en tonalité majeure, de fonction dominante, et de couleur 7), avec en chromatisme ajouté une 7e majeure.

Quelques exemples de l’utilisation des gammes Be-bop

Voici un exemple de l’utilisation de la gamme Be-Bop majeure contenu dans la première phrase du thème de Miles Davis Donna Lee :

Voici maintenant une illustration de l’utilisation de la gamme be bop dominante dans le solo de Chet Baker sur Autumn Leaves :

Remarquez comme il utilise le vocabulaire de la gamme be bop du Ve degré dès le début du ii V I, en zappant le second degré. C’est une astuce que nous pouvons lui piquer volontiers.

À noter que dans mes deux exemples, les gammes be-bop sont jouées dans le sens descendant, c’est surtout de haut en bas que vous trouverez cette gamme dans les solos des grands jazzmen.

La Gamme Be-Bop : Résumons

Dans cet article nous avons vu que :

  • En jouant de longues phrases en croches, une hiérarchie s’installe entre les notes. Celles qui tombent sur le temps vont paraître plus importantes que celles en contretemps
  • Nos gammes à 7 sons ont donc un problème : jouées de manière conjointes, au bout de 7 notes, les bonnes notes ne tombent plus sur les temps
  • La gamme Be-Bop et son chromatisme intégré résout ce problème car le nombre de notes qu’elle contient correspond au nombre de croches dans la mesure
  • Les trois gammes Be-Bop essentielles sont : la gamme be-bop majeure (à jouer sur les accords majeurs), la gamme Be-Bop mineure (à jouer sur les accords mineurs), et la gamme Be-Bop dominante (à jouer sur les accords 7)
  • La gamme Be-Bop est surtout jouée de haut en bas, dans le sens descendant.

En plus de sauver les longues et virtuoses phrases de nos solos, la gamme Be-Bop a un son typé qui renvoie à l’âge d’or du Be-Bop. L’employer vous permettra donc de contribuer à perpétrer cet héritage. Longue vie au Be-Bop !

J’espère que cet article vous a été utile. Si vous avez des questions, des remarques, laissez un commentaire, je vous répondrai avec plaisir.

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Image de couverture : Portrait of Charlie Parker, Tommy Potter, Miles Davis, Dizzy Gillespie and Max Roach, Three Deuces, New York, N.Y. Vers août 1947. Par William P. Gottlieb. Domaine public

Comment entendre plus facilement la basse ?

Vous n’entendez pas ce que joue le bassiste de votre groupe ? Vous n’arrivez pas à distinguer le hauteurs de note dans le registre grave, et échouez à repiquer des grilles ?
Ne cherchez pas plus loin : Votre oreille n’est pas assez entraînée pour entendre la basse.

Et pourtant, ce serait chouette de pouvoir comprendre ce qui se passe en bas du spectre sonore… Vous sauriez exactement où vous en êtes dans une grille, vous pourriez commencer à entendre les couleurs d’accord de votre pianiste en fonction de la basse, etc…
Bref, arrêter de vous perdre et entendre ce que vos camarades jouent afin de pouvoir réagir en conséquence.

Peut-être que tout cela vous semble insurmontable à accomplir, mais ne vous en faites pas, tout problème a sa solution.

Comme pour beaucoup de chose en matière de musique, pour affiner son oreille, il faut l’entraîner. Comme ça, elle peut mémoriser les bonnes sensations auditives et les relier ensuite à vos connaissances théoriques.

Avez-vous l’habitude de vous concentrer longtemps sur le jeu de votre contrebassiste quand vous jouez avec lui ? Relevez-vous des lignes de basse régulièrement ?

C’est pour vous mettre dans cette direction que j’ai écrit cet article.
Vous allez y (re)découvrir la basse sous toutes ses coutures, apprendre quel est son rôle dans la section rythmique, et certaines techniques récurrentes dans le jeu des bassistes qui peuvent nous aider à mieux comprendre ce qui se passe, et les repiquer plus facilement.

C’est parti !

Qu’est-ce qu’une contrebasse, et qu’est-ce qui la rend si difficile à entendre ?

*J’emploie le terme « basse » pour désigner l’instrument qui tient ce rôle dans un groupe de jazz. Mais l’instrument en lui-même peut être une contrebasse, une basse électrique, la main gauche d’un organiste…
Dans cet article, je me focaliserai sur le plus difficile à entendre : la contrebasse.

La contrebasse est un instrument à cordes, constitué de haut en bas d’une tête avec des chevilles d’accordage, de cordes qui descendent le long d’un manche au dessus de sa touche et ce jusqu’au chevalet.
Ce dernier est posé sur une caisse de résonance qui a pour but d’amplifier le son créé par la vibration des cordes de l’instrument.

Cette vibration est créée par la main droite du.de la bassiste (si il.elle est droitier) qui va pincer les cordes et les relâcher. Pour modifier la hauteur de la note jouée, sa main gauche va presser la corde en un point précis sur la touche, ce qui va avoir pour effet de modifier la longueur de corde qui vibre et donner une hauteur de note différente que celle de la corde à vide*.

Première information extrêmement importante : Les 4 cordes « à vide » (*en les attaquant sans les presser sur la touche avec la main gauche) sont accordées comme ceci : E1, A1, D2, G2.

Les chiffres après les lettres correspondent aux hauteurs par rapport aux touches de piano, dont le clavier débute avec le « la zéro » -> A0, Bb0, B0, puis C1, etc…

Remarquez le petit 8 en dessous de ma clé de Fa, qui

Comme vous pouvez le voir, le registre de la contrebasse commence dans l’extrême grave du piano, région que nous n’avons pas vraiment l’habitude d’écouter attentivement.

De plus, la manière de jouer d’un bassiste de jazz (qu’on pourrait qualifier de pizzicato pour un contrebassiste classique) donne un timbre sourd, rond, mat à l’instrument, ce qui veut dire qu’il est pauvre en harmoniques.

Il est donc plus compliqué de discerner la hauteur d’une note à la contrebasse qu’au piano par exemple (son timbre étant plus riche en harmoniques).

Voilà pourquoi entendre la basse n’est pas si évident. Maintenant, intéressons-nous à sa fonction, et voyons si nous pouvons en tirer quelque chose d’utile pour nos repiquages.

Quel est le rôle de la basse dans la section rythmique ?

Traditionnellement, la basse connecte les fondamentales des accords d’une grille de jazz à l’aide d’une « ligne » ou d’un « riff« .

La ligne de basse a souvent un rythme régulier constitué de blanches ou de noires (on parle de Walking Bass), à la différence d’un riff dont la forme rythmique peut être plus complexe.

Une Walking Bass en noires.
Un extrait du riff de basse d’Equinox (John Coltrane)

C’est parce que la contrebasse est l’instrument avec la tessiture la plus grave du groupe qu’elle joue les fondamentales des accords (fondamentale : Note la plus grave d’un accord, à ne pas confondre avec « tonique » qui désigne seulement la note du premier degré de notre tonalité).

En swing, le.la bassiste joue ces fondamentales sur le premier temps de la mesure s’il n’y a qu’un accord dans celle-ci.

Si la mesure comporte deux accords, la basse joue la fondamentale du second accord sur le troisième temps de la mesure.

Donc, si vous connaissez bien votre grille, écoutez la basse et vous saurez où vous en êtes dans le morceau.

De même, connaître la grille d’un morceau dont vous relevez la ligne de basse vous donne un indice sur potentiellement la moitié des notes !

À noter : Les bassistes prennent un malin plaisir à avancer ou retarder la venue des accords, ou bien à jouer une autre note que la fondamentale de l’accord (et réharmoniser)…
Mais dans la majorité des cas, si le morceau est vraiment « standard », vous n’aurez pas de mauvaises surprises.

Trois éléments du jeu de contrebasse essentiels à connaître pour en repiquer plus efficacement

1. Les cordes à vides et leurs harmoniques

Voici de nouveau les cordes à vide de l’instrument : E1, A1, D2, G2.

En fait, ces cordes à vide sont un véritable atout pour le.la bassiste.
Le fait de pouvoir jouer une note sans devoir utiliser sa main gauche lui donne énormément de flexibilité.
En effet, les bassistes peuvent jouer une note dans le médium-aigu de leur instrument et revenir dans le grave aussitôt en jouant une corde à vide.

Ce qui est un avantage pour eux.elles peut être un inconvénient pour nous car cela donne parfois de grands intervalles difficiles à entendre dans leurs lignes.

Arrivé au Mi de la corde de Sol, je laisse le temps à ma main gauche de se replacer en haut du manche en jouant la corde à vide de Mi, créant un intervalle de deux octaves dans ma ligne !

De la même manière, les harmoniques des cordes de Ré et de Sol sont souvent utilisés et créent parfois de grands intervalles dans les lignes.

Petit point terminologie : Que sont les « harmoniques » d’une corde ?

Tout son est composé d’une fréquence fondamentale qui détermine sa hauteur, à laquelle s’ajoute d’autres sons : les harmoniques. Ces sons sont des multiples de la fréquence fondamentale, ils peuvent être plus ou moins nombreux, ce qui détermine entre autres le timbre du son.

Sur un instrument à cordes, ce terme peut aussi désigner plusieurs points de résonance situés à des endroits clés de la corde. Effleurer ces points avec la main gauche (sans presser la corde contre la touche) tout en attaquant la corde avec la main droite va faire résonner un harmonique précis contenu dans le timbre de la corde.

Dans le cas de la contrebasse, un harmonique en particulier nous intéresse, celui de l’octave de la corde à vide, situé pile-poil au milieu de la corde (cela correspond à la 12e frette d’une basse électrique ou d’une guitare).

Mon dernier intervalle est une octave utilisant l’harmonique de la corde de Sol.

Utiliser cet outil permet au.à la bassiste de faire résonner deux notes en particulier sans avoir à maintenir la main gauche appuyée sur la touche (comme pour les cordes à vide). Ces notes sont les octaves de D2 et G2 : D3 et G3.

Ainsi, si vous entendez de grands intervalles dans le jeu de votre bassiste, il utilise à coup sûr les cordes à vide et ses harmoniques, soit les notes E1, A1, D2, G2, D3, G3.

2. Les Ghost Notes

Les Ghost Notes sont littéralement des notes « fantômes », qui sont là sans vraiment l’être…

En fait, ce terme désigne une note sans hauteur définie, présente dans le jeu du bassiste pour lui donner du relief en l’enrichissant rythmiquement.

Pour ce faire, le.la bassiste attaque la note à la main droite et l’étouffe à la main gauche, comme ceci :

Ces notes n’ayant pas d’importance harmoniquement parlant, il est donc possible de les omettre dans nos relevés. Cependant, c’est une des techniques préférées des bassistes pour faire groover leur ligne de basse, rythmiquement parlant, elles sont essentielles.

Donc, si vous désirez les noter, utilisez cette écriture :

Quand on connaît l’instrument, on peut écrire une ghost note à la hauteur de la corde à vide sur laquelle elle est jouée par le.la bassiste.
Si vous n’êtes pas familier avec le fonctionnement de la basse, notez la comme une note d’approche à la note suivante de votre relevé, juste au-dessus ou en-dessous.

Pour résumer, si vous entendez une petite pique rythmique sans hauteur apparente, pas besoin de vous casser la tête, vous êtes face à une ghost note.

3. Les Fills

Voici un point plus problématique. Un fill est une ponctuation dans le jeu du bassiste, quelques notes jouées rapidement généralement à la fin d’une carrure de 4 mesures.

Les 4 dernières mesures d’un Blues en Do, avec un fill pour relancer à la fin (je le rejoue ensuite au ralenti pour que vous puissiez en saisir tous les détails)

Les bassistes utilisent des fills pour enrichir leur jeu, leur donner du relief rythmique, répondre au soliste…

Sauf que je ne vous l’ai pas encore indiqué, mais la contrebasse est un instrument délicat à maîtriser, son ergonomie fait qu’il est difficile d’en jouer rapidement

Pourquoi ce détail est-il important ? Parce que cela va nous aider dans nos relevés : Les bassistes vont au plus simple et au plus pratique pour jouer leurs fills, en utilisant… des cordes à vide !

Comme l’attaque de la contrebasse se fait naturellement de l’aigu vers le grave, les fills ont en majorité une direction descendante.

Une autre astuce utilisée par les bassistes pour jouer rapidement est la technique du pull-off, qui désigne seulement une attaque de la corde en la pinçant tout en relâchant la note précédente à la main gauche (ce qui économise une attaque de main droite). Dans la vidéo plus haut, mon fill commence par un pull-off.

Les fills que vous entendrez utilisent donc à coup sûr cordes à vide, parfois des harmoniques, et des pull-offs.

Résumons ensemble :

Dans cet article, nous avons vu que :

  1. La basse joue les fondamentales des accords sur les 1er temps des mesures (1er et 3e temps s’il y a deux accords par mesure) ;
  2. Les cordes à vide (E1, A1, D2, G2) et les harmoniques D3 et G3 permettent aux bassistes d’insérer des grands intervalles dans leurs lignes ;
  3. Les ghost notes sont des notes purement rythmiques sans hauteur, qu’il n’est pas indispensable de noter ;
  4. Les fills contiennent toujours les cordes à vides ou leurs harmoniques et sont joués de l’aigu vers le grave (souvent grâce à un pull-off).

J’espère que cet article vous aidera à mieux entendre le jeu de votre bassiste, et à repiquer de la basse plus facilement.

Toutefois, même avec ces astuces, le plus important est de se familiariser avec le son et le registre de l’instrument, ce qui veut dire en relever régulièrement.

Par chance, j’ai conçu un programme de relevé spécialement à cet effet : 30 jours pour mieux entendre la Basse

Si jamais :

  • Vous rêvez d’improviser d’oreille sur des standards de jazz ;
  • Vous aimeriez pouvoir retranscrire des grilles d’accords facilement, sans avoir besoin d’un piano ;
  • En improvisant, vous voulez décoller les yeux de la grille sans vous perdre ;

Alors ce programme va être un précieux allié pour vous. Pour en savoir plus, cliquez sur le bouton ci-dessous :

Image de couverture : Slam Stewart at Keystone Korner, San Francisco CA 4/28/81. Playing with Illinois Jacquet.
© Brian McMillen / brianmcmillen@hotmail.com

Groupes rythmiques (groupings) : Augmentez votre vocabulaire rythmique

J’ai une devinette pour vous :
Comment se distinguer dans un groupe où tout le monde joue de belles notes ? … En les jouant bien en place !
Plus sérieusement, le rythme est Le paramètre qui rend votre jeu intéressant. Après tout, une note bien rythmée dans un solo vaut mieux qu’une longue suite de croches maladroites.

Si vous avez atterri sur cet article, c’est que vous trouvez que vos solos manquent de pêche côté rythmique. Que toutes vos phrases se ressemblent un peu, et que sur la longueur, vos idées se répètent.

Devant ce constat, beaucoup de solutions s’offrent à vous. Vous pouvez jouer avec différents placements comme je l’explique dans cet article, varier vos débuts et fins de phrases, jongler entre différents débits

Mais aujourd’hui, nous allons nous intéresser à un procédé assez simple, popularisé dans les années 60 par des instrumentistes comme Wynton Marsalis ou Kenny Garrett : Les groupes rythmiques (aussi appelés « groupes de notes » ou « groupings »).

Si vous avez lu mon article sur les équivalences, sachez que c’est un type de groupe rythmique, nous allons aller plus loin dans cet article. Et si vous êtes vraiment assidu·e, vous allez reconnaître ici certains exemples tirés de mon article sur Kenny Garrett et son utilisation des motifs. Commençons.

Qu’est-ce qu’un groupe rythmique ?

Le premier exemple est celui de Kenny Garrett sur Mack the Knife. Écoutez et constatez que son débit rythmique change à 1’40 :

Voici maintenant un second exemple, cette fois-ci de Wynton Marsalis. Écoutez la figure rythmique qu’il développe :

Comme vous pouvez le voir dans ces deux exemples :

Un groupe rythmique est une polyrythmie consistant à faire se superposer les appuis normaux d’une mesure et un groupement spécifique de ses subdivisions.
Pour que la polyrythmie soit intéressante, lorsque la décomposition du temps est paire, le groupe doit être impair. Inversement, lorsque la décomposition du temps est impaire, le groupe doit être pair.

Quelques petites précisions pour m’assurer que vous avez bien compris :

  • Polyrythmie : Superposition de différents rythmes entre eux.
  • Groupe impair : groupe de 3, 5, 7, … subdivisions
  • Groupe pair : groupe de 2, 4, 6, … subdivisions

Autrement dit, jouer un grouping consiste à répéter une figure rythmique dont les appuis se décalent par rapport à ceux de la mesure initiale.

Il est possible de ne jouer que la première subdivision de chaque groupe comme Kenny Garrett, ou plusieurs voire toutes les subdivisions internes du grouping comme dans l’exemple de Wynton Marsalis.

Créons ensemble un groupe de 3

C’est parti, apprenons à utiliser cet outil. Pour ce faire, voici de nouveau quelques rapides notions de base :

  • Temps de la mesure : Différentes pulsations à l’intérieur d’une mesure. Dans une mesure à 4/4, le temps est habituellement la noire.
    4/4 = 4 noires par mesure, donc 4 temps par mesure.
  • Subdivisions du temps : Décompositions du temps
    Un temps d’une mesure à 4/4 peut être découpé en de plus ou moins gros morceaux, qui sont nos subdivisions (croches, double-croches…)

Prenons maintenant une mesure à 4/4 binaire, dont le temps (la noire) est divisé en 4 double-croches.

Mon exemple audio dure 4 mesures, la voix du haut est jouée par un métronome avec un son aigu sur chaque 1er temps. La voix du bas est assurée par une caisse claire qui accentue les débuts de groupe.

Groupons maintenant ces subdivisions par 3 :

C’est super, mais avez-vous remarqué qu’un nouveau groupe démarre sur la dernière double-croche de la mesure, et est par conséquent incomplet ?

En effet, il manque la seconde et la troisième subdivision de ce dernier groupe. Ajoutons deux mesures afin que le début d’un groupe tombe sur le 1er temps d’une mesure :

Le cycle de notre groupe de trois est ainsi terminé. Constatez qu’il faut 3 mesures pour que le début d’un groupe coïncide avec un 1er temps. 3 mesures pour un groupe de 3, c’est plutôt pratique pour s’en souvenir, non ?

Cette loi est valable pour tout groupe rythmique : Le cycle d’un groupe de X dure X mesures (quelle que soit la métrique).

Maintenant, gardons seulement la première subdivision de chaque groupe :

Nous voilà avec 3 mesures de groupes de 3.

Le stade ultime de cette manipulation rythmique est, comme le fait Tony Williams avec les équivalences, de créer une sensation de nouveau tempo en se servant des débuts de groupes comme de « nouveaux temps ».

En voici une illustration avec 4 mesures d’un groove binaire basique suivies de 3 mesures du même groove, mais calé sur les appuis du groupe de 3 :

Prudence si vous utilisez cet outil en tant que soliste ! C’est plutôt rare, mais la rythmique peut vous rejoindre et créer cette sensation de tempo différent. Si jamais vous perdez le fil de la métrique de base, bon courage pour retomber en place !

Les autres groupes courants

Le groupe de 3 est le grouping le plus répandu. Cependant, il en existe d’autres. Nous allons dans cet article rester dans le cas d’une mesure binaire, découvrons donc les autres groupes impairs courants, les groupes de 5 et 7.

Pour des raisons autant pratiques que musicales, les groupes de 5 et 7 ont des divisions intérieures, et comportent donc plusieurs appuis.
La formule la plus fréquente pour les constituer est la suivante :

  • Groupe de 5 : un groupe de 2 + un groupe de 3 ;
  • Groupe de 7 : Deux groupes de 2 + un groupe de 3.

Si vous voulez constituer un groupe de 9, il suffit de rajouter un groupe de 2 au début : 2 + 2 + 2 + 3 = 9. Un groupe de 11 ? 4 groupes de 2, puis un groupe de 3. C’est aussi simple que cela !

Pour illustrer ces exemples, voici un extrait d’un solo du saxophoniste Stéphane Guillaume où il utilise de manière rapide le groupe de 5, en ne marquant que ses deux appuis internes :

Cela se passe exactement de 7’57 à 7’58, soyez à l’écoute :

Écoutez comme il retombe sur le temps avec la rythmique, c’est ce genre d’effet que vous visez en utilisant un groupe rythmique.

Pour un exemple plus accessible, consultez cette courte vidéo (moins d’une minute) sur la chaîne Youtube de Jazzcomposer.fr :

https://www.youtube.com/shorts/T2w9Er_hw58

Les groupes rythmiques et le swing

Si vous êtes toujours avec moi, vous vous dites peut-être :

« C’est super toutes ces mathématiques, mais comment je l’applique à mes bons vieux standards ?? »

À l’instar de Marsalis et Garrett, il suffit de grouper les croches swing.

En swing, un temps est divisé en 2 croches inégales. La première se rapproche de deux croches de triolet rassemblées, et la seconde, la troisième croche de ce triolet. Comme ceci :

Groupons maintenant ces croches par 3 (sur le schéma, la « grosse » note correspond à la première note du grouping) :

Et voilà le travail. Je ne vous cache pas que l’intégration de groupings dans votre jeu demande un peu d’entraînement pour être bien en place, et surtout pour ne pas se perdre !

Voici quelques pistes pour travailler les groupes rythmiques :

(Commencez par le groupe de 3 en 4/4 binaire, c’est le plus facile).

  1. Commencez par poser votre instrument ! Même sans les contraintes des bonnes notes, de la technique, de vos pistons, tampons ou autres touches, il vous faudra un peu d’entraînement pour arriver à exécuter un grouping (en faisant en sorte que ça groove !), donc ne vous rajoutez pas de difficultés inutiles.
  2. Prenez un métronome et mettez le à un tempo raisonnable. C’est fait ? … Baissez encore d’une vingtaine de points, et là vous serez vraiment à un tempo raisonnable !
  3. Vos pieds vont maintenant marquer les 4 temps de la mesure, l’un après l’autre (commencez avec celui qui vous plaît le plus).
  4. Chantez toutes les subdivisions avec les onomatopées de votre choix. Si cela vous aide, vous pouvez utiliser des onomatopées comme « Takatiki » ou « Takadimi », mais je vous encourage à rapidement délaisser ces formules scolaires peu musicales pour des syllabes improvisées, ou même l’imitation de percussions.
    Cette étape est sans doute la plus importante, quoi que vous fassiez, n’oubliez jamais d’intégrer la découpe dans votre phrasé ! De cette façon et seulement de cette façon, vous serez parfaitement en place.
  5. Commencez par accentuer une subdivision sur trois, sur seulement une mesure, en alternant par exemple avec une ou deux mesures de découpe non-accentuée. Vous chantez un groupe de 3 !
    Si cela vous aide, vous pouvez aussi marquer cet accent en frappant des mains.
  6. Quand vous maîtrisez la 5e étape, et que ça groove vraiment, ajoutez une mesure.
  7. Répétez la 6e étape autant de fois que vous voudrez, allez au moins jusqu’à 4 mesures.
  8. Enlevez les pieds ! Attention car cette étape est clairement la plus compliquée, et va vous demander un peu de persévérance. Vous allez perdre le fil de la métrique de base et votre sensation du tempo va se synchroniser sur les groupings, mais tenez bon ! Commencez par une mesure sans les pieds, alternée par une ou deux mesures de découpe non-groupée avec les pieds tapant les 4 temps. Puis ajoutez une mesure sans les pieds, etc…
    Vous pouvez aussi partir de l’étape 7, et enlever progressivement des temps tapés au pied. Ne tapez plus que les 1er, 2nd et 3ème temps, puis seulement 1er et 2nd, puis le 1er… Et vous serez arrivés à destination !
  9. Une fois que c’est à votre portée, prenez votre instrument et appliquez votre groupe de 3 sur une grille standard, en prenant pour subdivision la croche swing. Alternez entre des mesures de silence et des mesures de grouping, d’abord sur une ou deux notes qui traversent la grillent sans dissonances, puis avec les notes que vous voulez.
  10. Recommencez avec les groupes de 5 et 7 !

Conclusion

Voilà, vous savez tout sur les groupes rythmiques.

Même en les exécutant basiquement sur une seule note, les groupings vont attirer l’oreille des gens qui jouent avec vous et du public, sans vous demander trop d’effort. C’est donc un outil parfait à avoir dans les doigts pour augmenter son vocabulaire et rendre vos solos plus intéressants !

Dans cet article, nous avons vu qu’un groupe rythmique est une polyrythmie consistant à faire se superposer les appuis normaux d’une mesure et un groupement spécifique de ses subdivisions.

Nous avons créé ensemble un des groupes les plus fréquents, le groupe de 3, ainsi que ceux de 5 et 7.

Puis, nous avons vu comment le transposer au swing en choisissant la bonne subdivision à grouper. Et nous avons conclu sur une méthode pour les implémenter dans votre jeu, en faisant en sorte de groover le plus possible.

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Image de couverture : Wynton Marsalis at the Oskar Schindler Performing Arts Center (OSPAC) Seventh Annual Jazz Festival in West Orange, NJ. 13 September 2009. Par Eric Delmar. Domaine Public.

Comment travailler le jazz pendant les vacances ?

C’est les vacances ! (Pour certains d’entre nous, en tout cas…)
Le mois de juillet est déjà bien entamé, vous profitez sans doute de l’été pour prendre un peu de repos, partir en vadrouille à l’autre bout du pays, ou pour les plus chanceux, enchaîner les concerts.

Mais ce quotidien estival peut poser un problème de taille.

Habituellement, vous avez sans doute plus de temps pour penser à votre pratique du jazz, vous êtes sans doute installé.e dans une routine de travail, peut être au sein d’un cursus dans une école…
Autant d’éléments favorisant une progression rapide de votre niveau, sans que vous vous en rendiez forcément compte.

Une période de vacance, par essence, chamboule l’ordre établi et perturbe cette progression. Sans rythme imposé, vous prenez le risque de stagnerVoire de régresser !

À délaisser votre instrument, vos doigts vont « rouiller » et ne plus bouger aussi vite qu’avant. Votre oreille va prendre la poussière et vous prendrez plus de temps à repiquer des morceaux, ou vous repérer dans les grilles. Votre phrasé ne va plus swinguer aussi bien qu’habituellement, et toutes vos idées vont prendre un temps fou à arriver jusqu’à vos doigts, comme si votre cerveau peinait à suivre la cadence infernale du tempo qui défile.

Je ne sais pas vous, mais pour moi, ce sentiment de régression est un véritable cauchemar !
Pour peu qu’une jam se glisse au beau milieu de l’été, je me retrouve dépité à ne plus savoir quoi penser de ma pratique, après avoir passé 2 morceaux à pédaler dans la semoule…

Si cette situation vous parle, et que votre été rime avec « vacances en famille loin de votre instrument » lisez attentivement la suite. Dans cet article, je vous propose 3 étapes qui ont fait leurs preuves de mon côté, et vous éviteront le stress des doigts rouillés !

Étape 0 : Faire une (GROSSE) pause

Malgré tout ce que vous avez pu lire en introduction, vous pouvez faire le choix conscient et assumé de n’absolument RIEN faire pendant ces vacances. Cela peut même vous être bénéfique, à la condition de ne pas culpabiliser face à l’inactivité.

Une longue pause de deux ou trois mois m’a fait du bien par le passé. J’avais en effet accumulé beaucoup de frustration au cours de mon apprentissage… Ce break m’a permis de m’y remettre avec l’esprit frais et de pointer du doigt de mauvaises habitudes à bannir. En bref, de me recentrer sur l’essentiel.

En choisissant cette option, vous perdrez forcément en dextérité, mais le bénéfice peut être énorme, surtout si comme moi frustrations, mauvaises habitudes et mauvais état d’esprit parasitaient votre pratique.
Et, pas de panique, le jazz, c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas !

Si toutefois vous ne ressentez pas le besoin de faire une pause, et que vous ne voulez pas perdre en niveau, passons à la première étape.

Étape 1 : Planifier

À vos agendas ! Afin de ne pas être submergé par l’imprévu, prenons un peu de hauteur et contemplons ces deux mois qui s’annoncent plus ou moins denses selon chacun de nous.

Si vous aviez rempli un calendrier précis de vos vacances, c’est parfait. Sinon, faites-le ! Notez les endroits où vous allez être, la durée de vos séjours, les activités prévues…

Une fois que c’est fait, regardez le tout, et constatez comme moi qu’il vous reste quand même du temps libre. Quelques jours par-ci, quelques heures par-là, et même aux endroits où vous êtes pris, vous pouvez dégager du temps pour entretenir votre jazz.

Planifiez dès maintenant les créneaux où vous allez pouvoir le faire, notez si vous devez prendre votre instrument avec vous, etc… Cela va vous rassurer et vous pourrez passer à la 2nde étape.

Étape 2 : Fixer ses objectifs

Maintenant, réfléchissez à ce que vous voulez accomplir pendant ces vacances. Sans les échéances d’un cursus, vous n’avez peut-être aucune idée de ce que vous voulez travailler ! Pas étonnant qu’il soit dur de s’y mettre, si votre cerveau pense qu’il n’y a rien à faire…

Ou, inversement, vous avez peut-être l’impression d’être submergé.e par le travail à rattraper, et ne savez pas par où commencer.

Si vous avez beaucoup de concerts à préparer, vos objectifs sont vite fixés !
Si non, vous avez deux solutions. Soit vous voyez à long terme et fixez un gros objectif, soit vous découpez vos deux mois en objectifs plus petits.

Concrètement : J’ai pour projet de repiquer, rejouer, analyser et comprendre ce que fait le trompettiste Ambrose Akinmusire en intro de ce morceau :

Je pense que ça va me prendre un mois (sans me presser !), je considère cela comme étant un moyen/petit objectif.

Par contre, je veux pouvoir être en mesure de jouer 6 standards en guitare solo à l’issue de ces vacances. Sachant que j’aimerais repiquer quelques grilles de Julian Lage pour avoir plus d’idées dans mes propres chorus dans ce format bien particulier, et qu’il faut que j’adapte les 6 thèmes pour jouer en même temps mélodie et accords, c’est un gros objectif (qui risque lui de me prendre toutes les vacances).

Pour venir à bout de vos objectifs, la clé est de morceller :

  • Objectif : Jouer 6 standards en guitare solo.
  • Sous-objectifs : Repiquer Julian Lage, adapter mes 6 thèmes, trouver intro et coda pour chaque.
  • Actions concrètes à réaliser aujourd’hui : 1 nouvelle phrase de Lage à apprendre, trouver la bonne tonalité et travailler à trois tempo I Should Care, écouter ce podcats de Learn Jazz Standards pour trouver une idée de coda.

Pour fonctionner de cette manière, vous devez être capable de définir vous même en toute autonomie les bons exercices qui vont vous permettre d’atteindre vos objectifs.
Si vous avez du mal à faire cela, demandez à un prof ou à un camarade jazzman plus expérimenté de vous aider.

De cette manière, vous pourrez passer à la 3e et dernière étape :

Étape 3 : Se dégager un espace de travail (confortable), et s’y mettre !

Depuis peu, je mets un point d’honneur à travailler dans des espaces dédiés à ma pratique, notamment après la lecture de cet excellent article (en anglais) du site Jazzadvice.
Pour vous montrer à quel point c’est important, laissez-moi vous raconter une anecdote :

« C’est les vacances ! L’occasion pour moi de passer quelques semaines à la campagne chez mes parents. Cela induit forcément un chamboulement d’emploi du temps et d’espace de travail, mais j’y fais face en me fixant des objectifs dès le premier jour, en me dégageant un espace confortable pour travailler ma trompette et poser mon ordinateur afin de réaliser des enregistrements, mixer, composer, etc…

Cependant, au bout de la première semaine, je me rends compte que je n’ai pas touché à ma guitare, je n’ai pas joué une seule note, ce qui pour moi est carrément inhabituel. Il faut dire que j’ai eu moins de temps à lui consacrer que d’habitude, et puis, j’ai perdu de vue ce que je voulais accomplir pendant ces vacances sur cet instrument… Comble de tristesse, l’instrument est resté dans sa housse, à l’autre bout de la maison, et une ou deux araignées y ont même élu domicile !

Ni une, ni deux, je m’en empare, saisis un pied, un vieil ampli qui traînait par là (qui au final fait parfaitement l’affaire !), et installe le tout à côté de mon bureau, en gratouillant un peu au passage. Je vais même jusqu’à déposer un bout de papier et un crayon sur l’ampli, afin de me noter ce que je veux faire le lendemain pour avancer dans mes objectifs.
Résultat des courses la semaine suivante : J’ai travaillé ma guitare tous les jours, progresse de manière efficace dans mes objectifs et ai toujours du temps pour faire tout le reste, alors que mes journées n’ont pas rallongé par miracle. »

Pour moi, ce que je viens de vous dire est la preuve concrète que l’espace que vous vous créez pour travailler est presque aussi important que ce que vous travaillez.

Pour conclure ce point je terminerai avec un conseil de Joe Pass que m’a transmis un de ses élèves (qui est maintenant un de mes profs), Frédéric Loiseau : « Veille à ce que ta guitare soit toujours sortie de sa housse à la maison ».

C’est évident, mais terriblement juste !

Conclusion

Voilà, vous êtes parés pour faire face aux vacances et réussir à progresser envers et contre tout. Ou du moins… À ne pas régresser !

  • Dès à présent, si possible, planifiez vos vacances et dégagez des plages dédiées à votre pratique musicale. Rappelez-vous, 10 minutes de travail efficaces valent mieux qu’une heure à travailler n’importe comment (cf cet article). Même si votre emploi du temps est surchargé, vous avez bien 10 minutes de libre…
  • Ensuite, fixez vous un gros ou plusieurs petits objectifs. Le ou les morceller rendra la tâche plus claire et abordable.
  • Enfin, réfléchissez à un endroit où vous vous sentirez bien pour travailler convenablement.
  • N’oubliez pas de travailler !

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10 bonnes raisons de relever (repiquer, retranscrire…) des solos de jazz

C’est un véritable passage obligé pour un jazzman, les plus grands s’accordent à le dire : Relever des solos de jazz est un travail essentiel. Malgré cela, il y a des bonnes raisons pour que cet exercice vous lasse, voir qu’il vous insupporte !
Après tout, c’est normal d’en avoir marre de passer des heures à distinguer un Ré bécarre d’un Ré bémol, de ne pas entendre cette fichue contrebasse, de ne pas savoir sur quel temps tombe cette satanée mise en place, de recoller note après note les morceaux inintelligibles de cette phrase en double-croches…

Ainsi, il est possible que vous ayez lâché l’affaire, et concentré vos efforts sur un autre exercice moins exigeant !

Dans ma pratique personnelle, il m’est arrivé de ne plus retranscrire de solo pendant des mois ! La première chose que je retiens de cette période, c’est une impression de stagnation. Une désagrable sensation de ne pas avoir progressé, en tout cas pas autant que les moments où ma pratique était organisée autour de la transcription.

C’est pourquoi je vous présente 10 bonnes raisons de relever des solos de jazz, autant de raisons qui vous feront voir l’exercice autrement, et vous convaincront de vous y atteler de nouveau (ou de ne pas arrêter !).

1. Relever des solos nous fait absorber la tradition

J’ai une petite question pour vous :

Avez vous déjà écouté un jazzman d’aujourd’hui qui vous a fait penser à un jazzman d’hier ?

Les exemples sont multiples :

  • Christian Scott ressemble à Miles Davis comme deux gouttes d’eau ;
  • Il y a du Bud Powell et du Art Tatum chez Pasquale Grasso ;
  • Le style icônique de Thelonious Monk est copié par tous les grands pianistes de Chick Corea à Kenny Barron en passant par Fred Hersch…

Tous ces jazzmen ont relevé leurs aînés et rejoué des heures durant leurs tics, tocs, gimmicks et autres licks. Tels des éponges, ils ont absorbé leurs manières de phraser, articuler, nuancer…

Personnellement, quand je me réécoute, j’arrive à relier tous les éléments de mon jeu aux solos que j’ai relevé, ou aux jazzmen/disques précis que j’ai écouté en boucle.

Le mot « tradition » en jazz désigne tout l’héritage qu’ont en commun les plus grands et auquel il faut emprunter pour devenir bon à son tour.
Quoi de plus puissant pour s’en imprégner que la transcription ?

2. Relever des solos nous fait jouer du jazz de la « bonne » manière

Ce second point est dans la directe continuité du premier.

Bien sûr, il existe beaucoup de façons de jouer du jazz, selon le style, l’époque, les jazzmen ou groupes que l’on adore… Mais, pour la plupart, les millions de solos gravés sur micro-sillon sont autant de points de référence quant à comment « bien » jouer le jazz.

Relever Miles Davis par exemple nous informe sur les « bonnes » notes à utiliser, la « bonne » manière de se placer, une certaine « bonne » façon d’organiser ces notes pour arriver à jouer de « belles » phrases.

Le jeu de Sonny Rollins est bien différent de celui de Miles, mais sa manière de phraser et les notes qu’il utilise sont tout aussi « bonnes ».

Toutes ces heures passées à reproduire le jeu des grands jazzmen est autant de temps dédié à « bien » jouer du jazz. À se placer correctement, à articuler de la bonne manière, à jouer de belles phrases, et donc à bien sonner à notre tour.

3. Relever des solos étend notre vocabulaire

Ce troisième point va vous paraître plus évident, vous y avez sans doute pensé dès la lecture du titre de cet article ! Et pour cause, pour étendre son vocabulaire, avoir plus d’idées et d’histoires à raconter sur les grilles de jazz, la transcription est une excellente solution.

Votre travail peut être centré sur une phrase en particulier, à transposer dans les douze tons et à jouer sur une cadence précise. Mais il peut être aussi plus chirurgical et concerner une articulation, une manière d’approcher une note guide, un timbre spécifique, une technique particulière…

En jam, j’ai même surpris plusieurs fois des phrases de solos que je n’avais même pas travaillé spécifiquement jaillir de ma trompette !

Si vous avez la bonne méthode, retranscrire des solos de jazz va étendre très rapidement vos capacités de jeu, et vous rendre confortable dans beaucoup de situations différentes.

4. Relever des solos fait travailler notre oreille et notre rythme

Restons pragmatique ! L’oreille et le sens du rythme sont deux compétences clé chez un jazzman, aussi utiles pour se repérer dans un morceau que pour être à l’aise en le jouant.

« Dépourvu » d’oreille, vous ne pouvez pas jouer sans grille, et si vous vous perdez, aïe aïe aïe. Peu précis rythmiquement, votre jeu va paraître maladroit, et si la rythmique se complexifie…

Quel rapport avec le relevé de solo ? Eh bien, le repiquage vous fait compter les temps et vous force à reconnaître des intervalles et des figures rythmiques pendant des heures et des heures.
Cela ne peut être que bénéfique pour développer vos compétences.

5. Relever des solos nous pousse à nous dépasser

Si vous vous attelez au repiquage d’un virtuose, vous allez forcément arriver à un point où vous n’avez pas la technique nécessaire pour exécuter un passage. Devant ce constat, deux choix s’offrent à vous :

  • Le passage est vraiment trop complexe, vous l’esquivez donc (ou vous le simplifiez) pour pouvoir vous concentrer sur ce qui vous paraît à votre niveau.
  • Ou bien vous sentez que la difficulté peut être surmontée, et vous entreprenez un travail technique pour en venir à bout.

La seconde solution peut vous prendre beaucoup de temps (j’ai récemment relevé un morceau qui a nécessité plus de deux mois de boulot !).
Mais le travail technique fourni en vaut la peine, car il élève votre niveau et vous fait progresser.

De plus, les choses qui vous paraissaient complexes jusqu’alors ne semblent plus aussi difficiles…

6. Relever des solos nous connecte aux autres

Laissez-moi vous raconter une anecdote pour expliquer ce point.

Je me trouve sur la scène d’un club, en bonne compagnie, à monter l’après-midi pour le soir même un répertoire dédié à la musique de Duke Ellington. Nous jouons ce soir là en Septet, avec dans la formation deux trompettistes (moi y-compris).

Au cours de la répétition, nous déchiffrons un morceau au tempo médium et qui a pour tonalité Ré bémol. Un des deux trompettistes doit faire un solo. Nous nous essayons alors à jouer sur la grille, l’un après l’autre. Je ne sais plus qui a commence, mais après que le premier ait terminé, l’autre lui lance un regard amusé signifiant : « J’ai compris ce que tu viens de faire ! ».

Et pour cause, le premier trompettiste avait cité (plus ou moins consciemment) le début d’un chorus de Clifford Brown qui collait avec la grille. Le second l’avait manifestement aussi travaillé, et vous pouvez être sûrs qu’il l’a cité par la suite !

Ce petit moment amusant a eu pour effet d’apaiser l’ambiance, de faire retomber le stress, et a montré de manière évidente les points communs entre nous deux.

De la même manière, lorsqu’en jam, vous citez de manière évidente un gimmick connu (La Cool Blues Lick, des groupings, etc…), ou tout autre partie incontournable du répertoire que vous avez relevé, les autres membres du groupe vont forcément réagir !

Ce genre de connexion est bénéfique, et uniquement faisable si vous repiquez du langage jazz régulièrement.

7. Relever des solos permet de mieux jouer les différents styles de jazz

Je pars du principe qu’il est mieux d’adapter son jeu aux différentes situations que nous rencontrons en tant que jazzman.

En effet, il est possible dans la même semaine de jouer dans les styles New Orleans, Be-bop, Swing, Jazz contemporain, Jazz-Pop, etc…

Comment réagissez-vous pour être le plus cohérent possible au sein de chaque groupe ? À chaque style appartient un vocabulaire différent.

Relever des solos afin de s’imprégner de ce vocabulaire est donc indispensable !

8. Relever des solos donne les réponses à toutes les questions

Vous avez bien lu ! Vous pouvez trouver toutes les réponses aux questions que vous vous posez dans un solo/morceau/accompagnement de jazz.

Comment jouer sur un ii V i mineur ? Repiquez Bill Evans ou Clifford Brown.
Je n’arrive pas à bien utiliser la gamme blues ? Le thème Sandu commence par un plan blues !
Comment jouer moderne ? Écoutez/Repiquez Chris Potter, Brad Mehldau, Michael Brecker, Ben Wendel et tant d’autres !
Comment composer un morceau comme Dave Holland ? À moins de lui demander ou de prendre un cours avec lui, la seule solution et de… Repiquer ses compositions !

Bien sûr, il est parfois difficile de savoir où chercher les réponses…
C’est pourquoi la culture d’un prof qui s’est déjà posé ces questions avant vous est indispensable.

Vous pouvez aussi lire des articles comme celui-ci… À bon entendeur !

9. Relever des solos nous fait penser différemment

De la même manière qu’il étend notre vocabulaire, le relevé peut ouvrir nos possibilités de réflexion en nous confrontant à des instruments différents du notre.

En tant que trompettiste, j’ai bien sûr relevé énormément de trompette, afin de m’imprégner de la tradition de l’instrument. Mais j’ai aussi relevé du sax, de la guitare, du trombone, du piano, de la batterie… (pour ensuite les rejouer à la trompette). Ce, dans le but de comprendre comment les autres instrumentistes pensent en fonction de leurs instruments respectifs.

En effet, l’ergonomie de notre instrument a vite fait de nous cantonner à une manière précise de jouer. Par exemple, un pianiste joue beaucoup plus horizontalement (avec des arpèges…) qu’un contrebassiste car ses mains se sont habituées aux empreintes des accords.
Relever des solos de pianistes permet donc à un contrebassiste de penser son instrument différemment.

Un bon exemple de jazzman repoussant les limites de son instrument est le guitariste Pasquale Grasso :

Il a réussi à se rendre unique en adaptant le langage du pianiste Bud Powell (entre autres) à la guitare. Et personne n’avait rien entendu de tel jusqu’alors (je n’invente rien, c’est Pat Metheny qui le dit…) !

Sa guitare sonne vraiment comme un piano, si vous voulez savoir pourquoi… Repiquez-le !

10. Relever des solos est un travail gratifiant

Quel bonheur d’enfin arriver à bout de cette phrase qui nous a donné du mal pendant des heures et des heures !
Quel sentiment jouissif de prendre la place de Miles Davis en étant accompagné par sa rythmique légendaire !
Que c’est agréable d’entendre intégré à notre jeu un plan que nous travaillions d’arrache-pied !

Ce point est sans doute le plus important. Si vous n’aimez pas repiquer des solos, n’en retirez aucun plaisir, alors ne le faites pas !

Mais ça m’étonnerait…

Conclusion

Voilà donc 10 bonnes raisons de repiquer des solos de jazz.
En bref, relever des solos :

  1. Nous fait absorber la tradition
  2. Nous fait jouer du jazz de la « bonne » manière
  3. Agrandit notre vocabulaire
  4. Fait travailler notre oreille et notre rythme
  5. Nous pousse à nous dépasser
  6. Nous lie aux autres
  7. Permet de mieux jouer les différents styles de jazz
  8. Donne des réponses à toutes nos questions
  9. Nous fait penser différemment
  10. Est un travail gratifiant

Je suis sûr que cet article vous a donné envie de reprendre cet exercice si vous l’aviez abandonné ! Pour autant, si vous ne savez pas par où commencer et qu’il faut que vous bossiez votre swing, cliquez ici.

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Image de couverture : Billy Strayhorn, New York, N.Y., between 1946 and 1948. William P. Gottlieb. Domaine public. Restauration : Adam Cuerden

3 manières d’intégrer des motifs dans vos solos (merci Kenny Garrett !)

Marre de jouer les mêmes phrases dans tous vos chorus ? D’improviser tout le temps avec les mêmes idées ? Le public et la section rythmique s’endorment pendant vos solos…? Un radical changement dans votre vocabulaire s’impose. 

Si vous êtes comme moi, vous n’avez pas envie de passer pour quelqu’un qui fait du remplissage, qui ressort pour la millième fois ses clichés be-bop qu’on a entendu (en mieux) partout ailleurs. Au contraire, vous voulez que vos chorus racontent une histoire, que votre jeu soit connecté à la section rythmique, et au final captiver les gens qui vous écoutent

Une façon très commune, facile, et puissante d’y parvenir est d’utiliser des motifs dans votre improvisation. Prendre une de vos idées et la répéter au moins une fois, tout en la développant.

Cela peut paraître facile et évident, mais bien souvent, nous n’y pensons pas, ou bien une fois sur deux nous essayons mais sans être très clairs, ou alors nous le faisons constamment de la même manière

Car oui, il y a plusieurs façons de faire apparaître un motif au cours de votre improvisation, et si vous faites toujours la même chose… Vous allez paraître ennuyeux, scolaire et peu inspiré.e…

Alors, comment font les grands jazzmen pour créer des motifs ?

Pour répondre à cette question, j’ai réécouté quelques solos d’une référence en la matière : Kenny Garrett. Vous connaissez sans doute cette légende du sax alto, qui a absorbé TOUT le langage be bop, pour ensuite innover en l’utilisant de manière inconventionnelle et sonner « out ». Eh bien, il utilise des motifs dans chaque solo qu’il prend, c’est vraiment une part essentielle de son jeu.

Garrett crée ses motifs de 3 manières différentes, que je vais vous présenter dans cet article.

Remarque : Je vais me concentrer sur la création et non le développement des motifs dans l’improvisation. Si ce dernier point vous intéresse, voici une vidéo très intéressante (en anglais) qui analyse un solo de Paul Desmond.

1ère manière de créer un motif : Reprendre une fin de phrase

C’est la plus évidente, donc j’en parle en premier. Il s’agit simplement de reprendre la fin de notre phrase précédente, et de la répéter. Cela a pour effet de renforcer notre message, et construire notre discours en insistant sur ce que nous venons de dire. 

Garrett crée ce genre de motifs très souvent. Par exemple, dans son solo sur Ornithology, il l’utilise dès le stop chorus, en reprenant les deux notes de la fin de la mélodie : 

Même si j’avais dit que je n’en parlais pas (considérons cela comme un petit bonus !), le développement de son motif est intéressant : il octavie ces deux notes un peu au hasard, donnant un effet accidenté singulier, et réussi.

Ce type de motif réapparaît dans le même chorus, de manière plus évidente :

À un autre endroit, il joue avec le dernier segment d’une de ses phrases, le répète deux fois, puis le re-cite une troisième fois un peu plus loin. Ça raconte tout de suite une histoire :

Vers la fin de son chorus, il enchaîne sur une citation du thème de Charlie Parker Cool Blues, un grand cliché d’improvisation be bop. Il l’utilise comme à son habitude de manière inconventionnelle en reprenant la petite trille de fin pour la décliner 6 fois :

Vous pouvez travailler cette première manière de créer un motif dès maintenant. Jouez une phrase sur un standard, et au moment de la terminer pour en débuter une autre, mémorisez ce que vous êtes en train de jouer. Répétez ensuite cette fin de phrase, en la développant au besoin selon l’harmonie. 

Travaillez ceci dans un premier temps de façon systématique, sur toute une grille. Ensuite, parsemez plus ponctuellement vos improvisations de ce type de motifs. 

Remarque importante !

Attention à ne pas tomber dans le piège classique de l’improvisation motivique, qui a vite fait de nous faire sonner scolaire et cliché dès lors qu’on l’utilise trop souvent.

Dans un autre solo de Garrett sur Mack the Knife, je trouve qu’il répète la fin de ses phrases un peu trop fréquemment, comme « par défaut ». 

Il l’utilise une première fois de 1’11 à 1’21 (mesures 43 à 46 de la vidéo), et recommence avec la phrase qui commence à 1’50 (mesure 63), développant une autre super idée sur 4 mesures.
Il aurait pu s’arrêter là, mais pour terminer sa phrase, il réutilise la fin du motif qu’il vient de décliner et la répète (à partir de 2’02, mesures 70-72), ce qui est à mon goût « le motif de trop » !

À utiliser avec parcimonie…

2nde manière de créer un motif : Répéter un segment entier, ou carrément toute une phrase

Cette seconde manière est la plus basique (mais curieusement pas la plus utilisée) de faire apparaître un motif dans notre solo.
Il s’agit simplement de jouer une ou deux notes, ou un segment mélodique un peu plus long, ou bien une phrase entière, puis de la/le répéter.
(Il ne s’agit plus de reprendre la fin d’une phrase mais bien la phrase dans son intégralité).

Garett l’utilise de manière significative au début de son solo sur Mack the Knife de 0’56 à 1’18 (mesure 33-44) :

Sa phrase de départ est une réinterprétation de la mélodie. Il la répète deux fois, en la développant différemment, d’abord en changeant la fin, puis en la transposant.

Voici un autre exemple sur le morceau Not You Again (une démarcation de There Will Never Be), où Garrett transpose une petite phrase d’une mesure :

Ou encore ici, sur le début d’une grille de Giant Steps, avec comme motif de départ seulement trois notes (une triade descendante) :

Il n’y a pas de grande différence entre cette manière de créer un motif et la première que je vous ai exposée, mais en variant les deux, et la longueur du motif (une ou deux notes, une petite phrase d’une mesure, une phrase plus longue…) on évite le piège du « motif de trop » !

3e manière de créer un motif : Jouer avec un motif rythmique 

La troisième manière de jouer avec ces motifs est un peu à part, car elle repose à 100% sur un seul paramètre : le rythmeIl s’agit de jouer sur une note ou deux, et de la/les répéter suivant un débit précis ou bien une clave.

De cette façon, vous parlez le langage de la section rythmique, et vous pouvez vous attendre à ce qu’elle réagisse et vous rejoigne !

Garett l’utilise de manière concise sur Not You Again

Ou sur une plage beaucoup plus longue dans Giant Steps :

Il fait varier plusieurs notes sur un débit de noires pointées dans Mack the Knife à 1’39 (mesures 57-62) : 

Cette manière de rassembler les notes est très commune, on appelle cela un « groupe de trois » (ici groupe de trois croches, parfois notées sur le relevé avec un débit de noire pointée, ou une noire liée à une croche, ou une croche et un soupir…).

Un petit mot sur les Groupings

Les groupings désignent le fait de répéter un débit précis sur une durée conséquente. C’est à dire faire le choix de n’utiliser qu’un seul débit (un groupe de X croches, noires, croches pointées, etc…) sur plusieurs mesures.

Leur utilisation devient intéressante en groupant des débits impairs sur une métrique paire, comme dans l’exemple ci-dessus où Garrett répète un groupe de 3 croches sur une métrique 4/4 qui en contient 2 par temps. Les points d’appuis se retrouvent déplacés, créant un fort contraste rythmique.

L’utilisation des groupings est un sujet très vaste, mais j’ajouterai juste une autre démonstration avec un autre groupe impair très commun, le groupe de 5 :

Vous avez sans doute remarqué que nous avons changé d’instrumentiste ! À vrai dire, j’avais sous le coude ce chorus de Wynton Marsalis sur Giant Steps qui montre une utilisation d’un grouping en tant que motif. Dans l’extrait, il utilise le groupe de 5 croches en en jouant 4 et en laissant la dernière silencieuse.

À ce tempo, c’est assez délirant, et sur ce type de grille encore plus !!!

Conclusion

Vous savez désormais comment Kenny Garrett fait apparaître des motifs dans ses improvisations.
Comme lui, vous pouvez maintenant :

  • Reprendre la fin de votre phrase précédente
  • Créer un segment de phrase ou une phrase entière puis le/la répéter
  • Ou encore utiliser une cellule rythmique, comme une clave ou un groupe de notes.

Utiliser des motifs dans votre improvisation va varier votre vocabulaire, provoquer la rythmique, et au final enrichir votre discours et faire de vous un meilleur improvisateur.

Travaillez ces trois manières distinctes dès maintenant sur n’importe quelle grille de votre choix, d’abord à un tempo modéré et en gardant le motif sur toute une grille. Puis improvisez librement, et surprenez-vous à en créer au milieu d’un de vos solos !

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Si vous avez la moindre remarque, question, précision, écrivez un petit commentaire ci-dessous, je vous répondrai avec plaisir.

Image de couverture : Kenny Garrett mit seinem Quintett im Stadttheater Rüsselsheim Hinterbühne am 29. Oktober 2013. 29 October 2013. Jens Vajen. CC BY-SA 4.0

La FLEMME de travailler le jazz : Décryptage, comment la combattre

Ah la flemme… Si vous êtes comme moi, vous connaissez bien cette sensation entre la végétation et la fatigue. Elle nous met KO, nous immobilise sur notre canapé, et nous empêche d’être productifs… Quand nous avons abattu quantité de boulot en amont, la flemme est agréable et méritée, mais quand elle surgit au moment de nous mettre sérieusement au travail… C’est la cata.

Je suis une grande victime de ce fléau, qui m’empêche tantôt de plancher sur un travail important, de passer un coup de fil désagréable, ou pire, de sortir mon instrument de sa housse, pour bosser le jazz.

Et si Miles Davis avait eu la flemme de bosser sa trompette ? Si Bill Evans avait procrastiné sa recherche de voicings ? Si Coltrane avait préféré regarder la télé plutôt que de répéter inlassablement ses gammes ?

Tant de génies n’auraient pu s’exprimer s’ils avaient eu la flemme..!

Blague à part, ce serait quand même beau, un monde où nous serions toujours motivés et en forme pour travailler, et donc en progrès constant. Un monde dans lequel nous n’aurions plus l’impression de stagner par flemme de travailler.

Alors j’ai fait mes recherches, et, même si le sujet peut paraître anecdotique, sans importance, il s’avère que je ne suis pas le seul à m’y intéresser. Des scientifiques se sont penchés sur la question, ce qui m’a permis d’identifier trois clés pour remporter le combat contre la flemme.

Attention, dans cet article, vous ne trouverez pas de conseils du style « Couchez-vous et levez-vous tôt » ou « Faites une to-do list ». Je pense que vous avez déjà entendu ce genre d’astuces un bon millier de fois, et même si elles se révèlent souvent utiles, essayons d’aller un peu plus en profondeur dans le sujet.

C’est parti, commençons par nous intéresser aux causes psychologiques à l’origine de la flemme.

Comprendre la Flemme

Difficile de trouver des ressources sérieuses qui traitent du sujet ! J’en ai quand même trouvé deux qui vont se révéler utiles.

D’après cet article issu d’un site spécialisé dans la psychologie, la flemme est en fait un mécanisme psychologique qui résulte en un blocage mental conduisant à l’impossibilité de passer à l’action.

Ce blocage peut avoir trois causes :

  • Le fait que la tâche à réaliser n’engendre aucun plaisir ;
  • Qu’une angoisse profonde et inconsciente vienne parasiter notre motivation ;
  • Ou que l’accomplissement de la tâche en question bouscule notre conception du monde (ce que nous avons intégré comme étant correct et possible). 

J’ai par ailleurs beaucoup entendu parler du livre The War of Art de l’écrivain américain Steven Pressfield (il occupe la première place des bouquins que je dois lire de toute urgence !).
D’après ce que j’en ai compris, l’objet du livre est le combat contre ce que Pressfield appelle la « Résistance ».
Ce rassemblement de blocages psychologiques causerait une sévère procrastination au moment d’accomplir une tâche impliquant un processus créatif, plus particulièrement dans le cas de l’auteur : l’écriture d’un livre.

Spoiler alert : La Résistance telle que la décrit Pressfield ne disparaîtrait en réalité pas vraiment, mais il existerait cependant des moyens de la combattre et de l’atténuer, ce qui me donne de bons espoirs quant à l’issue de mon combat contre ma flemme personnelle.

1er conseil : Renouer avec le plaisir

Par le passé, ma routine de travail ressemblait à ceci : 30 min de tel exercice, 15 de montées et descentes de gammes selon tel ou tel pattern, de l’ear-training bête et méchant, du déchiffrage !

Tout cela n’est pas franchement fun, et ces exercices, certes utiles, n’étaient pas directement reliés à la raison première de mon engagement envers le jazz. À la cause profonde qui m’a poussée à aller à fond dans cette voie.

Et vous, quelle est cette chose qui vous a émue au départ, qui vous a poussé à acheter un instrument, investir du temps et de l’argent dans cette pratique ? Quel est cet élément qui vous procure du plaisir ?

Une des raisons qui me pousse à vouloir faire du jazz se manifeste souvent quand je tombe sur des vidéos de guitaristes en solo. Je suis instantanément plongé dans un état de fascination face à l’inventivité et l’élégance avec laquelle ils résolvent le problème inhérent à l’exercice : Réussir à jouer un morceau dans son entièreté (ligne de basse, accords, mélodie, structure en même temps…) avec seulement six cordes, deux mains, et un seul cerveau !

Je ne sais pas pourquoi, mais cela fait naître en moi une motivation infinie qui pourrait me faire lever des montagnes. Je ressens une envie irrésistible de me mettre à travailler. 

J’ai mis cette envie à la source de ma pratique, résultat : j’ai beaucoup moins de mal à m’y mettre !

Cela peut paraître évident pour certains d’entre vous qui lisez ces lignes, sinon, réfléchissez-y…
Est-ce que tout ce que vous travaillez est connecté à la cause de votre engagement envers le jazz ?
Si non, avez vous la flemme ou procrastinez vous votre pratique de tous les jours ?

2nd conseil : Affronter ses peurs 

Il est possible qu’un événement marquant de notre passé, remontant parfois jusqu’à notre enfance, oublié depuis longtemps, soit la cause du blocage mental qui mène à la flemme.

Pas le choix ! Il faut se faire sa propre psychanalyse, ou, si la flemme devient maladive, aller voir un psy.

Malheureusement, les limites de mes connaissances dans ce domaine m’empêchent de m’y étendre. Mais d’expérience, je peux toutefois vous conseiller, même sommairement. 

Voici quelques questions à se poser pour trouver la source du problème :

  • Pourquoi n’ai-je pas envie de me mettre à travailler le jazz ? 
  • Qu’est-ce qui m’en empêche physiquement ?
  • Rien ? Et mentalement ? Ai-je peur de quelque chose ?

La peur de l’échec, de ne pas être à la hauteur, de paraître ridicule, ou bien de souffrir sont autant de sources potentielles d’un blocage…

J’ai un exemple personnel mettant en scène la peur de l’échec :

Récemment, je bossais les tempos up, en m’enregistrant sans métronome.
Je voulais que mon time, mes lignes mélodiques et mon phrasé soient rigoureusement parfaits, mais à la réécoute, j’étais bien loin du compte…
Frustré devant mon inaptitude à atteindre mes objectifs, j’abandonnais et le lendemain, j’étais toujours hanté par l’échec de la veille, qui ne m’aidait pas à m’y remettre… ! 

Seule solution, descendre d’une marche de mon « escalier de progression ». Dans ce cas précis, j’ai enlevé 30 points de tempo, et même si c’était encore difficile, ce n’était plus inatteignable.
La réussite n’en a été que plus délectable, et a alimenté ma motivation pour le travail à venir. (Et j’ai fini par réussir mon exercice avec mes 30 bpm en plus !)

Ces peurs parasites (si elles ne sont pas maladives) peuvent être affrontées, il faut parfois faire preuve de lucidité, et de recul. Quitte à en passer par une autoévaluation honnête et une bonne dose d’humilité !

3e conseil : Bousculez votre conception du monde

La 3e cause potentielle de la flemme identifiée par Psychologies est particulièrement intéressante, et je me permets de citer un bout de leur article : 

Un conflit psychique, voilà une autre excellente raison de demeurer dans l’inertie.
« C’est la bataille que se livrent nos désirs et nos interdits, analyse Saverio Tomasella. Quand le désir – ce qui fait se mouvoir l’individu – entre en conflit avec ce qui a été intégré comme incorrect ou impossible, alors l’immobilisme est la seule solution. S’ensuit une forme d’indécision, de paralysie, l’expression de ce que l’on appelle la pulsion de mort. »
Si notre désir n’a pas été reconnu, accepté, valorisé, la pulsion de vie s’éteint. Nous sommes coupés dans notre élan. Et n’arrivons plus à avancer.

Posez-vous la question. Est-ce que, dans votre environnement, votre vœu de pratiquer le jazz a été « reconnu, accepté » et est « valorisé », encouragé ?

Est-ce la norme autour de vous ?

Pour ma part, la réponse et oui, et je mesure la chance que j’ai ! Je côtoie chaque jour des musiciens professionnels, ou des élèves de mon école qui aspirent à le devenir, mes parents sont musiciens, mon temps est consacré à 90% à la musique…

Travailler le jazz s’impose comme une évidence, pour rester au niveau, ou même se conformer à la pression sociale…

Mais tout le monde n’a pas cette chance, peut-être que votre temps est consacré à la famille que vous avez construite, peut-être que vous vous lancez tardivement, que personne ne fait cela autour de vous. La pratique du jazz est peut-être en total contraste avec votre environnement qui ne vous renvoie qu’une profonde incompréhension.

« À quoi bon travailler aujourd’hui ? », « N’ai-je pas mieux à faire ? »… Tant de questions qui fusent, et qui s’avèrent difficiles à gérer…

Si vous êtes dans ce cas, mais que le besoin de jouer du jazz reste irrépressible malgré tout, j’ai un conseil à vous donner. Même avec un contexte défavorable, il est possible de créer une fenêtre vers un autre environnement, où repiquer des chorus est un passe-temps prisé, travailler ses gammes, une préoccupation collective… Un monde où le jazz est roi.

Se créer un environnement virtuel fertile

Il suffit de faire appel aux outils numériques. À Internet et ses nombreux réseaux sociaux.

Grâce à Youtube, il est possible de prendre des cours avec les plus grands jazzmen de la planète ! Rien qu’en tapant « Masterclass Jazz » dans la barre de recherche, je peux suivre les enseignements de Pat Martino, Jim Hall, Benny Golson, Dee Dee Bridgewater, Cyrus Chestnuts, Chris Potter…

Grâce à Facebook et Instagram, je peux être en contact presque direct avec nombre de mes idoles, et rester au fait de leurs actualités.

Des forums fourmillent sur la toile, parfois dédiés à notre instrument, où l’on peut trouver les réponses à nos moindres questions et converser en compagnie d’initiés d’un sujet qui nous tient à coeur.

Des sites à l’image de Jazzcomposer.fr vous prodiguent conseils, enseignements, suggestions, cours en ligne…

J’ai même trouvé une chaîne de lives Twitch avec des séances de travail technique pour la trompette !! Parfait pour se motiver à travailler un aspect de l’instrument pas franchement sexy au départ…

Il est possible d’arrêter d’avoir la flemme, de se motiver et de créer des choses en s’aidant de cet environnement virtuel.
C’est personnellement ce que j’ai fait en m’immergeant sous des tonnes de vidéos, podcasts, articles de blogs et newsletters sur le blogging et l’entreprenariat. Jamais mon environnement physique ne m’aurait d’une quelconque manière amené à créer Jazzcomposer.fr.

Conclusion

J’espère que cet article vous sera utile, vous amènera des pistes de réflexion sur votre pratique et vous aidera à combattre la flemme de travailler le jazz.

  • Visez le plaisir dans votre pratique et reconnectez vous à ce qui vous a motivé à jouer du jazz.
  • Analysez vos peurs et appréhensions, cherchez ce qui les entretient dans votre pratique et agissez en conséquence.
  • Entourez vous d’un environnement propice, physique ou virtuel, et immergez vous la tête la première dans le jazz.

Grâce à ces conseils, la flemme n’a qu’à bien se tenir !

Et si, après avoir tout appliqué à la lettre, il vous arrive encore de procrastiner, essayez de vous coucher et de vous lever tôt, de faire du sport et d’avoir une alimentation saine, sait-on jamais…

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3 solos (faciles à relever) pour travailler le SWING (Phrasé/Placement)

Il y a quelques jours, on m’a demandé d’enregistrer le thème du morceau Driftin’, le célèbre hymne Hard Bop composé par Herbie Hancock. Le but était de « reconstituer » la superbe version de Christian McBride en trio avec le guitariste Mark Whitfield et le trompettiste Nicholas Payton. J’ai donc relevé l’interprétation du thème de Payton, dans le détail, et ai enregistré ma trompette seule, le casque sur les oreilles avec le trio pour m’accompagner. Au bout de quelques essais, je parviens à me faire une version correcte, je réécoute, et là… c’est le drame ! Ma partie (seule) ne swingue pas !

Je suis sûr que vous arrivez sans peine à vous identifier dans ce que je raconte. Quand nous sommes dans le jus, en train de jouer, toutes nos notes semblent tomber au bon moment, avec la bonne intention. Mais, au moment de s’écouter sur un enregistrement, c’est la désillusion ! C’est mou, plat. Le côté léger, rebondi, dansant du swing n’est plus qu’une lointaine impression.

Comme si Fred Astaire avait troqué ses claquettes, fines et précises, pour des charentaises, lourdes, qui font traîner le pied. 

(Ça n’a pas l’air de trop le perturber…!)

Il y a quelques années, une histoire similaire m’est arrivée. J’étais en session avec des super musiciens, et j’étais objectivement le moins bon de l’équipe. Néanmoins, l’énergie et le niveau des autres me propulsaient, j’avais l’impression d’être bien meilleur qu’en temps normal. C’était sans compter sur le fait que, comme à mon habitude, j’avais sorti mon portable pour enregistrer… Vous devinez la suite. En réécoutant, j’étais en fait placé beaucoup trop en arrière du temps, et mon phrasé était trop lisse…

Sur le coup, j’étais un peu démoralisé. Mais j’ai réagi, je ne me suis pas laissé faire, et j’ai essayé de corriger mes erreurs.

Une des choses qui m’a le plus aidé dans cette démarche a été de repiquer des jazzmen en traquant les petits détails, les petits riens qui changent tout, qui font qu’ils swinguent comme des bêtes !

Dans cet article, je vais vous présenter 3 solos qui ont changé ma vision du swing. Ils sont plutôt simples à jouer, ce qui permet de se concentrer au maximum sur 3 paramètres cruciaux que vous n’avez peut-être pas encore intégrés dans votre jeu.

Commençons avec :

Les 3 solos, et le paramètre n°1 :
le Débit

La trompette sera mise a l’honneur tout au long de cet article, puisque les 3 solos que j’ai sélectionnés sont respectivement de Miles Davis, Chet Baker, et Nat Adderley
Écoutez-les en vous focalisant sur le débit de croches de chaque trompettiste, et plus précisément sur la balance entre le binaire et le ternaire. 

Nat Adderley sur Never Say Yes :

Miles Davis sur Freddie Freeloader :

Chet Baker sur Nardis :

Le premier paramètre à prendre en compte pour améliorer son swing, c’est le débit de nos croches. Sont-elles majoritairement binaires, ou ternaires ?
Ce schéma va vous aider à mieux visualiser ceci :

  • À gauche, les croches binaires, chacune d’une durée égale. Elles sont le débit de base de la bossa-nova, de la funk ou du rock.
  • À droite, les croches swinguées (à 100%), la première est plus longue que la seconde. « À 100% » car l’écart entre la première et la seconde croche se rapproche du rapport entre les 1ère et 3e croches d’un triolet de croches, d’où le schéma : 

En réalité, ce type de swing très balancé se trouve peu dans le jazz que l’on écoute, et encore moins dans le jeu des instruments solistes.
Ce débit n’est pour autant pas impossible à croiser, il est à la base du shuffle par exemple.

Pour résumer TRÈS grossièrement, en Cool Jazz, on va avoir tendance à jouer un débit de croches plus égal, et en Hard Bop, plus inégal (pour ne citer que ces deux styles).

Chet, Miles, et Nat nous démontrent cela parfaitement. Réécoutez leurs chorus en prêtant encore une fois attention à ce détail, vous verrez que : 

  • Nat (plus Hard Bop) swingue ses croches (dans la globalité) presque au maximum. C’est presque trop à mon goût, parfois !
  • Miles (entre le Cool et le Hard Bop) pioche des deux côtés de la courbe, certaines de ses phrases ont des croches très balancées, et d’autres très égales, ce qui contribue à rendre son jeu expressif
  • Chet (plus Cool) a des croches bien plus binaires que ses deux camarades !

Toutes ces variations de débit sonnent, à vous de faire votre choix en fonction de ce qui vous plaît, du style de jazz que vous pratiquez, de ce que vous voulez exprimer sur le moment… 

Le paramètre n°2 : l’Accentuation

Les trois trompettistes ont beau avoir une conception du débit différente, ils ont en commun une chose fondamentale : l’accentuation du phrasé

Toutes leurs notes ne sont pas jouées avec la même nuance, la même intensité, la même intention. Et ce paramètre a énormément d’influence sur la manière dont nous percevons leurs messages respectifs.

Si je prends une phrase de Chet Baker au hasard :

Et que je trace un schéma avec l’intensité de chacune de ses notes :

Vous remarquerez sans peine que tout n’est pas joué au même niveau. Globalement, sa phrase a une forme de crescendo, puis decrescendo, et une croche sur deux est accentuée.

Je me risque à une analogie ! Ce tracé me rappelle les sismogrammes, ces schémas qui représentent l’intensité des ondes sismiques, qui déterminent la magnitude des séismes.

Sur l’échelle de Richter, une petite secousse que l’on sent à peine, de niveau 2 par exemple ressemblera à ceci :


Alors qu’une onde dévastatrice donnant un séisme de niveau 6 ou 7 aura ce tracé :

Vous l’aurez compris, nous avons tendance à avoir un tracé de phrasé proche d’une petite secousse, alors le swing des grands jazzmen est un séisme de magnitude d’au moins à 5 ou 6 sur l’échelle de Richter !

Il faut donc accentuer de manière plus marquée nos différentes notes.
Mais pas n’importe comment ! La bonne façon nous a été montrée par Chet ci-dessus, il accentue toutes les croches en l’air (celles qui ne tombent pas sur le temps) :

Et pour les noires ? Miles Davis nous donne la réponse :

Les 2e et 4e temps sont donc les temps qui dansent le plus.

Pour résumer simplement, en accentuant les 2e et 4e temps de la mesure et les croches en l’air, vous améliorerez grandement votre swing. 

Le paramètre n°3 : le Placement

Enfin, le meilleur pour la fin, le placement. Si vous n’avez jamais entendu parler de ce paramètre, cela correspond à la position de nos notes par rapport au temps. Il est possible de se placer parfaitement sur le temps, en arrière, ou en avant.

Mais quelle option choisir pour le swing ? La meilleure image que l’on m’ait montré pour m’expliquer le secret du bon placement, c’est celle d’un train en marche

Dans la locomotive se trouvent la contrebasse, avec la cymbale ride de la batterie. Puis, en première classe, le piano et la guitare*. Puis, enfin, encore derrière (dans le wagon bar !), les solistes/Soufflants/Chant

*La place de la guitare peut varier selon le type de comping adopté…

La Ride et la Contrebasse « drivent », elles tirent les autres instruments, et à aucun moment un wagon ne doit dépasser la locomotive ! 

Encore une fois, cette image est une simplification, mais à l’écoute des trois solos, cela se révèle correct. C’est flagrant chez Miles : 

Chez Nat Adderley, le pianiste et lui-même ont tendance à jouer très proche du temps, pas étonnant que le rendu final déborde d’énergie.

Le cas de Chet est assez représentatif de ce que l’on peut trouver chez les soufflants, en général. Il a tendance à varier son placement pour créer de la tension rythmique. Par endroits, il est dangereusement derrière, mais il se « rattrape » juste avant d’aller trop loin et se replace plus près du temps.

Ce placement un peu « flottant », (mais quand même majoritairement derrière !) est très commun, si vous réécoutez Miles, vous verrez qu’il joue de la même manière.

Pour autant, il est possible de trouver des instrumentistes qui jouent absolument toutes leurs notes en arrière du temps, le saxophoniste Dexter Gordon en est un bon exemple. 

Mais alors, comment bien se placer ?

Personnellement, un de mes professeurs m’a dit que j’avais tendance à être devant, puis un autre que je jouais trop derrière…

Je pense avoir trouvé une explication à cette divergence d’opinions. Pour un instrument à vent comme la trompette, ou le sax, il peut y avoir une mini-latence entre le moment où nous décidons de jouer une note et le moment où le son sort pleinement. C’est comme si ces instruments jouaient derrière, de base !

Même chose pour la contrebasse, l’attaque se fait en deux temps, on tire d’abord la corde pour la mettre en tension, puis on la relâche pour qu’elle entre en vibration. Cela créé forcément de la latence entre le moment où nous commandons à nos muscles d’effectuer l’attaque, et le moment où le son se fait entendre.

Par contre, le piano ou la batterie ont une latence beaucoup plus réduite, comme pour la majorité des instruments percussifs.

Si j’avais un conseil à donner :

  • Instrument à vent/Chant : Pensez « sur le temps », la nature de votre instrument vous placeront naturellement derrière, avec le bon dosage
  • Contrebasse : Pour pouvoir assurer votre rôle de locomotive, pensez très devant !
  • Batterie/ Piano : Si vous voulez être derrière, il faut se « freiner » intentionnellement, à travailler donc. Mais si vous voulez être sur le temps, jouez naturellement.

Une dernière chose sur ce 3e paramètre :

Une grande partie du fait que mon placement laissait à désirer et semblait trop en avant du temps venait en réalité d’un problème de technique.
J’étais en dessous des capacités requises pour jouer à la vitesse que je voulais, menant à une perte de contrôle du débit et à un stress qui nuisait à la qualité de mon exécution.
Au fur et à mesure que je progresse, ce stress a tendance à disparaître, mais je le sens parfois revenir, par exemple quand je travaille les tempos up.

Faites attention à ce petit détail, dès que vous sortez de votre zone de confort, votre placement (donc votre swing) peut en pâtir.

Conclusion

3 solos, 3 piliers fondamentaux du swing à maîtriser !

Si vous sentez que vous pouvez swinguer un peu plus, cet article vous a, je l’espère, donné les clés pour avancer.

Commencez par repiquer un des chorus dont je viens de vous parler, en essayant de coller au plus près des phrasé, placement, et débit du soliste.

Pour vérifier si vous êtes dans la bonne démarche, faites comme moi ! Enregistrez votre instrument seul, avec le solo au casque. Vous serez surpris du résultat, d’abord dans le mauvais sens, puis je l’espère, dans le bon.

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Image de couverture : Andre Hunter

Comment C.Brown et B.Evans domptent le Ve degré de la tonalité mineure

Dans la première partie de cette série d’articles sur la tonalité mineure, je vous présentais tout ce dont vous aviez besoin pour comprendre la théorie qui se cache derrière ce type de morceaux. En conclusion, je vous indiquais la manière dont le ii V I mineur est le plus communément joué sur les disques de jazz les plus célèbres. Aujourd’hui, je vais me concentrer sur le Ve degré de la tonalité mineure. « Pour quelle raison ? » me direz-vous…

Eh bien ce Ve degré m’a donné du fil à retordre. Comme vous allez le découvrir, sa couleur d’accord n’est pas du tout la même que celle du Ve degré de la tonalité majeure. Ensuite, le mode à utilisé sur cet accord est aussi très compliqué, il a beaucoup d’altérations et une échelle d’intervalle plutôt bizarre…
Enfin, nous verrons que ce Ve degré n’est pas joué de la même manière selon que l’on improvise ou que l’on accompagne !!

J’ai donc mis un temps fou à comprendre ces spécificités en me documentant, repiquant, analysant, jouant tout ce qu’il faut pour maîtriser cette infime partie de la théorie du jazz… 

Ne vous découragez pas devant l’ampleur de la tâche à accomplir…au contraire ! La lecture de cet article va vous éviter de passer des heures et des heures à éplucher des bouquins de théorie ou à visionner des vidéos de jazzmen anglophones obscurs…
Ainsi, à la fin de votre lecture, vous n’aurez plus qu’à appliquer les conseils que je vous donne, et je vous promets que vous sonnerez (au moins !) aussi bien que Clifford Brown, ou Bill Evans… !

Pourquoi un mode si alambiqué pour le Ve degré de la tonalité mineure ?

Reposons le cadre. 
Nous sommes dans un morceau en Do mineur. Lors de ma première partie, je vous présentait le ii V i mineur « basique » :

ii V i -> D-7b5 G7b9 C-6

Avec :

  • ii : D-7b5 : mode locrien
  • V : G7b9 : mode mixolydien b9b13
  • i : C-6 : mode mineur-majeur

« Mixolydien bémol neuf bémol quoi ?? » Le mode Mixolydien b9b13 (mixo b9b13 pour les intimes) nous cause bien des soucis…
Ce mode est issu de la gamme mineure harmonique (cf article précédent). Ainsi, il ne tombe pas aisément sous les doigts, principalement à causes de ses altérations de 9e et 13e, mais aussi de l’intervalle de seconde augmentée entre la b2 (ou b9) et la 3ce Maj :

Mais pourquoi utiliser un mode si compliqué pour notre Ve degré ? Un simple mixolydien ne fait pas l’affaire, comme pour les Ve degré de la tonalité majeure ?
Les tétrades des deux modes sont pourtant similaires (G7 : Sol Si Ré Fa), et fonctionnent dans un ii V i mineur : 

Le mode mixolydien pose problème dès que l’on ajoute ses extensions. Dès que sa neuvième majeure (La) et sa treizième majeure (Mi) sont empilées sur sa tétrade G7, voici ce que ça donne : 

Cela vous paraît il bizarre ? À moi, oui… !

En fait, il faut considérer les deux notes que l’on vient d’ajouter dans le contexte de la tonalité dans laquelle on se trouve, Do mineur.
Les notes qui colorent le plus cette tonalité sont les 3ce et 6te mineures de la gamme (Mi bémol et La bémol), qu’on peut retrouver dans les gammes mineures harmonique et naturelle.
Or, ajouter au Ve degré des extensions venant du mode mixolydien fait apparaître dans la cadence les 3ce et 6te majeures de la tonalité, La et Mi. Ces notes sont caractéristiques d’une couleur majeure, les ajouter au Ve degré sous forme d’extensions revient donc à annoncer une résolution vers un premier degré… majeur.

Cela explique donc pourquoi le mode mixolydien semble aussi déplacé dans une cadence mineure.

L’intérêt du mode mixo b9b13, c’est que, comme son nom l’indique, on ajoute les b9 et b13 à la tétrade de base :

C’est beaucoup mieux pour le Ve degré de la tonalité mineure… Mais, malheureusement, ces explications n’enlèvent rien à la difficulté du mode !
Pas de panique, comme je vous le disais plus haut, le célèbre trompettiste Clifford Brown va nous montrer une astuce pour simplifier les choses…

La substitution maline qu’utilise Clifford Brown pour se simplifier la vie sur le Ve degré de la tonalité mineure

Chose promise, chose due, voici trois phrases de Brown jouées sur des ii V i mineurs. Saurez-vous trouver leur point commun ? : 

Il se fond parfaitement dans les phrases, mais il est pourtant bien là :  Brown utilise un arpège diminué pour faire sonner le mode mixo b9 b13

L’utilisation de cette couleur diminuée a une explication théorique logique.

Rappelez vous, dans le précédent article, nous avions dressé la liste des degrés de la gamme mineure harmonique (d’où est tiré notre mode mixo b9b13).
Le viie degré de la gamme, qui était, comme le Ve, de fonction dominante, a une couleur d’accord… Diminuée !

En Do mineur, le Ve degré G7(b9) peut donc être substitué par le viie degré, B°. Cela se voit beaucoup en musique savante. Et, en jazz, cela permet très facilement d’arrêter de se prendre les pieds dans le tapis au moment de jouer notre Ve degré de la tonalité mineure.

Est-ce facile pour autant ? Eh bien, pas besoin de faire 3 équations à double inconnues pour trouver comment jouer cette substitution à partir de notre Ve degré :

L’accord diminué du viie degré démarre sur la 3ce Majeure du Ve degré, et ses 3 autres notes sont situées à des intervalles de 3ce mineures

Démonstration avec G7b9 :

Essayez de chanter les 4 notes de B° en jouant un Sol grave au piano. Vous n’avez plus qu’à terminer votre début de phrase par une résolution sur le ier degré (C-), et vous aurez compris la puissance mélodique de cet outil.

Les pianistes et guitaristes utilisent-ils aussi cette technique dans leurs accompagnements
Après tout, c’est possible et plutôt facile de le faire : 

Pourtant, dans la réalité, c’est tout autre chose qui se produit. Cette option semble délaissée par les accompagnateurs qui préfèrent faire appel à un tout autre mode pour jouer le Ve degré de la tonalité mineure : le mode Altéré.

La star des couleurs d’accord du Ve degré de la tonalité mineure : 7alt

Rappelez-vous, j’avais conclu mon précédent article en vous annonçant que la gamme mineure mélodique nous réservait bien des surprises…
Son premier degré nous avait apporté la couleur -6, qui est la plus prisée par les jazzmen.
Ce qui nous intéresse aujourd’hui, c’est le mode donné par son septième degré, le mode super-locrien, plus communément appelé mode Altéré :

Si vous voulez en savoir plus sur ce mode, téléchargez mon Ebook gratuit Les Fiches d’Identité des Modes.
Vous y trouverez quelques informations supplémentaires, comme des exemples de morceaux qui l’utilisent, son échelle d’intervalles, et aussi un voicing et une phrase de jazzman que j’ai retranscrit spécialement pour l’occasion.

Le mode Altéré est similaire à un mode locrien dont on a diminué la quarte.
La 4te dim est en fait enharmoniquement similaire à une 3ce majeure, ce qui rend le mode terriblement instable, car il contient déjà une 3ce… mineure !

L’oreille se fiche des noms des notes et l’illusion de la 3ce majeure l’emporte contre la « vraie » 3ce mineure. Cette dernière est perçue comme étant une extension, enharmoniquement la #2 (ou #9) ! 

Voici donc le « vrai » mode altéré et le mode altéré « perçu » par l’oreille : 

Si je vous raconte tout cela, c’est bien entendu parce que les jazzmen utilisent la seconde version, qui donne un accord pour le moins… explosif :

Les jazzmen ne jouent pas toutes les extensions, et préfèrent garder la #11 (ou b5) pour une autre occasion, que je vous présenterai sans doute dans un autre article.
Cela nous laisse avec 6 notes qui forment un accord 7b9#9b13 (sans la quinte), que l’on simplifie avec cette écriture : 7alt.

Vous pouvez entendre un exemple de l’utilisation du mode altéré sur le Ve degré de la tonalité mineure dès les premières minutes de l’album Chet Baker Sings :

En voici un autre exemple, cette fois-ci de Bill Evans, avec les premières secondes du morceau Gloria’s Steps :

Le son de la #9 est reconnaissable entre mille dans ce type d’accords (en top-note dans les deux exemples, ce qui accentue son importance). C’est une des notes caractéristiques du mode altéré, avec la b9 et la b13.
(Les plus attentifs auront d’ailleurs remarqué que je l’ai écrite avec la note de la 3ce mineure, son enharmonie, ce qui est mélodiquement plus pratique à lire.)

Vous devez donc être préparé à faire face au mode Altéré ! Miles Davis, par exemple, a du travailler ses ii V i mineurs avec cette idée en tête :

Michel Petrucciani aussi : 

Et je pourrais vous citer encore et encore des centaines de choses que j’entends quotidiennement ! 

Et voilà !

Dans cet article vous avez appris à slalomer entre les pièges du Ve degré de la tonalité mineure.

Grâce à Clifford Brown, vous savez comment une simple substitution permet de simplifier considérablement le mode mixo b9b13.
Vous savez aussi comment sonner comme tous les pianistes et guitaristes qui sévissent à partir des années 50 grâce à un mode à première vue obscur, le mode Altéré.

Deux pistes de travail peuvent maintenant enrichir votre jeu.
Il ne vous reste plus qu’à sortir votre instrument de sa housse et votre play-back de ii V i mineur, et travailler ces deux choses.
Même si lire cet article vous a fait gagner tout le temps de recherche et d’analyse, vous ne pourrez vous améliorer qu’en appliquant mes découvertes dans votre pratique.

Alors au boulot !

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N’oubliez pas de partager cet article à vos camarades jazzmen·women qui ne connaissent pas le mode altéré !

Image de couverture : Photo of jazz trumpeter Clifford Brown, September 15, 1956 Published in The News Journal, page 39, Associated Booking Corporation (management). Domaine Public.