Aujourd’hui, j’ai le plaisir de vous partager ma conversation avec le jeune pianiste Sylvain Le Ray. Il sort son premier album The Unchosen Way chez le label Hostel Records le 14 août 2020. À seulement 24 ans, il se positionne comme une voix singulière sur la scène jazz actuelle, sa musique est riche d’influences et porteuse d’un message qui se veut spirituel.
Parmi toutes les questions qui me venaient à l’esprit, j’ai choisi de me concentrer sur la création de son album. Au programme :
- L’histoire que raconte son album et comment elle influence sa musique ;
- Une anecdote sur un morceau enregistré au tout dernier moment ;
- Sa manière de composer dont nous pouvons nous inspirer ;
- Son regard sur le métier de musicien de jazz aujourd’hui.
Jazzcomposer.fr : Bonjour Sylvain. Première question plutôt vaste avant de nous plonger dans ton album. Pour toi, qu’est-ce qu’un musicien de jazz en 2020 ?
Sylvain Le Ray : Aujourd’hui, être musicien de jazz nécessite d’être polyvalent. Il n’est pas facile de vivre en jouant exclusivement du jazz.
Personnellement je fais du jazz, de la Salsa, de la musique traditionnelle, de la musique bretonne (je suis originaire de la région), etc…
C’est aussi important d’être dans un endroit concentrant beaucoup de musiciens. Je gravite à Rennes où j’ai beaucoup de projets, je commence aussi à en avoir à Paris. En parallèle, je suis en formation au Centre de Musiques Didier Lockwood. Plus on rencontre de gens, plus ça nous enrichit musicalement, et humainement.
Mon projet solo est très important pour moi. Pour autant, je ne me vois pas en vivre exclusivement d’ici 5 à 10 ans.
JC.fr : Ton premier album s’appelle The Unchosen Way. Quelle histoire raconte-t-il ?
SL : Je voulais parler des choses de la vie sur lesquelles nous n’avons pas d’emprise. De manière plus prosaïque, les trucs qui t’arrivent sans que tu puisses y faire grand chose ! En trois mots : The Unchosen Way.
Le message implicite est qu’il faut accepter qui nous sommes et être plus à l’écoute et respectueux de ce qui nous entoure. De manière plus large, on peut même y percevoir une dimension écolo !
Au moment où l’album a été enregistré (Octobre 2018), ces valeurs étaient particulièrement importantes pour moi, et je voulais les transmettre à travers ce disque.
L’idée était aussi de me démarquer. Je n’avais pas envie de faire simplement un album de jazz en mode « Salut, je m’appelle Sylvain Le Ray, je fais du piano… » !
C’est d’ailleurs grâce à mes études au Conservatoire de Rennes que j’ai pu faire ce premier disque à mon nom. Au départ, le trio s’est formé pour mon projet DEM !
JC.fr : Ton message a-t-il influencé la construction de l’album ?
SL : Il a influencé l’ordre des pistes, mais pas les compositions en elles-même.
J’étais dans un certain état d’esprit au moment de composer les morceaux, mon message n’était pas encore formulé de manière consciente.
Au moment de choisir un titre pour l’album, « The Unchosen Way » m’est venu de manière naturelle, cela faisait sens par rapport aux morceaux.
Concrètement, la première piste Imaginary World représente l’éveil d’un personnage, sa présentation à l’auditeur.
Les deux pistes suivantes (Etna et e-ruption) sont un peu plus agitées, mouvementées. Notre personnage (dans lequel je me transpose) est pris dans le tourbillon de la vie, dans une course effrénée.
Ensuite, Contradictions représente un état de remise en question par rapport à tout cela, et vient Openness où le personnage se libère progressivement, s’épanouit.
Young Years est une parenthèse à propos de la famille, et le dernier titre, Nouveaux Horizons représente un futur plein d’espoir.
Cette progression colle bien avec l’idée de l’acceptation de soi et de l’écoute de ce qui nous entoure.
JC.fr : Je trouve Young Years très réussi, parle-nous de ce morceau.
SL : C’est un air de musique traditionnelle bretonne que mon père musicien a collecté auprès de la grand-mère d’un de mes oncles.
Il l’a ré-arrangé pour l’enregistrer sur un de ses albums, et pour le jouer avec son groupe dans lequel j’ai remplacé quelques fois le pianiste.
Un jour, j’ai repris le morceau et me suis amusé avec, en m’inspirant de Tigran Hamasyan qui est une de mes influences principales. Son disque en solo A Fable est un de mes disques préférés. La piste Kakavik (The Little Partridge) m’a particulièrement inspirée, c’est d’ailleurs un air traditionnel que Tigran a réarrangé !
C’est drôle car nous n’avions pas prévu d’inclure ce morceau à l’album à la base. Au soir du second et dernier jour d’enregistrement de l’album (nous avions donc tout bouclé), dans l’euphorie, je me suis assis au piano et l’ai enregistré seul, en une seule prise !
JC.fr : Tes compositions sont très belles, et racontent toutes une histoire singulière. Comment t’y prends-tu pour composer ?
J’ai différent procédés… Pour ce qui est des morceaux de l’album, ça a fonctionné à l’inspiration.
Pour Imaginary World, c’est la mélodie qui m’est venue en marchant. Je l’ai ensuite arrangée, ai ajouté les accords, etc…
Openness est partie d’une idée purement rythmique, j’ai eu le riff dans la tête et suis parti dans une direction avec.
Par contre, j’ai modelé Etna de manière consciente. Je voulais que le morceau soit assez long et ressemble à une odyssée. J’avais plusieurs idées indépendantes qui mises bout-à-bout sonnaient bien.
Pour moi, tout part de l’idée. Après ce que tu en fais… le plus important c’est d’avoir l’idée !
Je ne pense pas non plus à l’esthétique de mes morceaux. Je trouve cela très compliqué de se forcer à écrire dans un style particulier.
Je pense que c’est une force, comme je n’arrive pas à écrire dans un style précis, je pense que naturellement, j’ai trouvé mon propre style !
JC.fr Merci Sylvain !
Cette interview vous aura sûrement donné envie d’écouter l’album :
Pour retrouver Sylvain Le Ray : Sur Youtube, Sur Instagram, Sur Facebook
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